Quatre ans après le tristounet Father Of All Mother Fucker, les Californiens de Green Day effectuent leur grand retour et quel retour! Fracassant, par la grande porte!
Le trio drivé par son chanteur et guitariste Billie Joe Armstrong a visiblement tiré de grands enseignements de cet échec de 2020, Father Of All Mother Fucker n’ayant pas reçu (et à juste titre) un bon accueil de la presse spécialisée. Avec Saviors, quatorzième album de la formation américaine, la tendance devrait logiquement s’inverser car Billie Joe et ses deux acolytes (Mike Dirnt à la basse et Tré Cool à la batterie) sont revenus, pour notre plus grand plaisir, aux fondamentaux qui firent leur succès. Aux manettes, le groupe a vu le retour de son maître artificier, à savoir le producteur Rob Cavallo à qui le trio doit les réussites de Dookie (94) avec notamment l’excellent Basket Case et, en 2004, le turbulent American Idiot dont furent extraits Holiday, Boulevard Of Broken Dreams et bien évidemment le single éponyme.
Par extension, Green Day a décidé de renouer avec le bon gros rock qui tape, qui cogne, bref qui envoie la sauce, ce qui n’est nullement pour déplaire aux fans de la première heure.
À l’image d’American Idiot, sur Saviors, le trio américain fustige l’Amérique et plus précisément les dérives du rêve américain. Billie Joe, Tré et Mike ne s’en prennent plus à un seul homme (en l’occurrence George Bush sur American Idiot), mais aux injustices engendrées par ce damné rêve américain. The American Dream Is Killing Me, premier morceau composé et enregistré, a été façonné dans cet optique et définit très clairement le thème de ce quatorzième album de Green Day. Le groupe s’est d’ailleurs longuement épanché sur le sujet qui, manifestement, lui tient très à cœur: « quand on voit la pauvreté des gens en Amérique, cela nous révulse, car tout le monde devrait y trouver son bonheur et y être heureux, sans exceptions! » Inégalités et injustices sont, on l’aura fort bien compris, les leitmotiv de Saviors, ses maîtres mots. Et Billie Joe de renchérir, accompagné de Mike Dirnt: « le monde est fou, il marche sur la tête, c’est ce que Saviors raconte. »
The American Dream Is Killing Me a donc été choisi comme premier single: « étant la première chanson écrite, il nous paraissait tout à fait normal qu’elle figure en premier dans la tracklist et qu’elle soit définie en tant que premier single. On s’est dits que ce serait The American Dream Is Killing Me et pas une autre! » Qui oserait en faire le reproche au trio américain, tant ce premier single s’est révélé d’une redoutable efficacité, osons même dire une bombe en puissance. Dès lors, l’espoir de voir éclore une livraison dantesque de Green Day était bien réel. Look Ma No Brains, Dilemma et plus récemment One Eyed Bastard se sont attelés à définitivement asseoir ce fabuleux constat: Saviors sera un grand album et qui plus est parmi les meilleurs de Green Day. Un quatorzième effort qui, incontestablement, se pose comme l’évènement rock de ce début 2024.
Jamais le binôme quantité/qualité n’aura jamais fait aussi bon ménage, car Saviors est constitué de 15 morceaux tous aussi bons et forts les uns que les autres. Aux excellents singles que sont One Eyed Bastard ou encore Look Ma, No Brains, des morceaux explosifs tels que 1981 et Strange Days Are Here To Stay apportent de façon magistrale leur obole à ce fantastique ensemble de pépites. Strange Days Are Here To Stay n’est pas sans rappeler, dans son riffing de guitare, le sulfureux Basket Case de 94 sur Dookie. La patte Rob Cavallo saute bien entendu aux oreilles! Green Day et Cavallo indissociables, à 100% oui!
Green Day, sur ce quatorzième opus, ce sont aussi des morceaux un poil moins rythmés mais tout aussi rock, parmi lesquels figurent Corvette Summer, Coma City, Livin’ In The 20’s ou encore Bobby Sox à qui l’on pourrait prêter volontiers, en intarissables connaisseurs du rock californien, de criantes similitudes avec Centipede, l’un des derniers succès en date de Fidlar.
À l’instar de Boulevard Of Broken Dreams sur American Idiot, Saviors recèle en son sein quelques magnifiques ballades: Fancy Sauce, Father To A Son et surtout, la plus splendide d’entre toutes, cette somptueuse autant qu’émouvante Goodnight Adeline, ce qui nous fait dire que même les rockeurs du style Billie Joe Armstrong ont du cœur et sont bien loin d’être handicapés du sentiment mais bon, rien de neuf, cet état de fait ne date pas d’aujourd’hui.
Goodnight Adeline, au même titre que Bobby Sox ou One Eyed Bastard, demeurera à la postérité parmi les grands temps forts de Saviors, de ceux qui porteront ce nouvel opus de Green Day au firmament du bon gros rock.
Avec Saviors, la bande à Billy Joe Armstrong signe sa meilleure prestation discographique, se permettant le luxe de dépasser Dookie et même American Idiot. Saviors: un album de 15 morceaux sur lequel Billie Joe Armstrong, Mike Dirnt et Tré Cool ont placé la barre très haut, se réconciliant indubitablement avec les déçus de Father Of All Mother Fucker. Il appartient à présent au trio américain de transformer l’essai en tournée, laquelle passera par la France!
Saviors: la flamboyante résurrection de Green Day!
Notre sélection: One Eyed Bastard, Goodnight Adeline, Bobby Sox, The American Dream Is Killing Me.