Le rock hexagonal est décidément en pleine peau, « on fire » comme diraient nos amis british. Preuve en est avec les Rouennais de Dye Crap dont le second effort, Life Is Unfair, vient de paraître chez Le Cèpe Records, ainsi que Kids Are Lo-Fi et Time Room Records.
Pour rappel, on avait découvert ce quatuor en 2021 avec son album éponyme Dye Crap, un opus à connotation shoegaze 80’s sur le modèle MNNQNS. Avec Life Is Unfair, le style est tout autre mais l’énergie se veut toujours aussi débordante.
Si l’opus Dye Crap se rapprochait de The Cure, son successeur vire à 180° au grunge nirvanesque et au post-punk estampillé 90’s de Weezer par exemple. Plus près de nous, on pense également à d’autres petits frenchys, ceux de Future Exes (Lille) très en verve en ce moment et dont on parle beaucoup.
Life Is Unfair s’est construit entre une ferme située non loin d’Evreux et le studio havrais d’Antoine (Tonio) Kopp où le quatuor s’est réuni durant une bonne semaine, avant que Thierry Minot ne mette la dernière main pour le mixage et le mastering.
Au cours des 11 morceaux de ce second album, Dye Crap aborde le mal-être de l’adolescence et le climat anxiogène qui en découle, sans parler de la difficulté de devenir de jeunes adultes. L’un des morceaux s’intitule d’ailleurs CAB (Adults Can’t Avoid Birthdays).
Depuis son album éponyme de 2021, le quatuor rouennais a mûri, pris de la bouteille, mais garde toujours à l’esprit une envie de se révolter et de tout envoyer balader quand il ne livre pas, dans des postures plus posées, ses inquiétudes face à l’avenir sombre qui nous attend du fait des maux de notre société actuelle. Alors, pour exorciser et conjurer ce pénible sort promis, les quatre petits gars de Rouen assènent leur musique déjantée comme si, inéluctablement, ils devaient mourir demain. Fort heureusement, Dye Crap comme nous tous, n’en sommes pas encore là et Life Is Unfair, plus que n’importe quel album rock, le démontre par A plus B. Les morceaux sont courts, sans pour autant être dépourvus d’intensité. Des morceaux bien pêchus tels que Cheers Neighbor, Good Days Again ou encore Chug It illustrent merveilleusement ce propos: du rythme, des riffs et surtout un punch à couper le souffle! Dye Crap, bien que s’étant orientés vers un style rock plus engagé, confirment et se bonifient au fil des périodes d’enregistrement. Plus encore, le quatuor rouennais se renouvelle et se réinvente, par exemples sur les ballades Mold et Homesick, single étendard de Life Is Unfair. Dye Crap n’ont rien à envier à des formations comme Nirvana ou Weezer dont ils s’inspirent énormément sur ce second album (Good Days Again, Serj et surtout Scatterbrain que la bande à Rivers Cuomo n’aurait pas renié, sans oublier ACAB (Adults Can’t Avoid Birthdays)).
« Faire les choses sérieusement sans se prendre au sérieux », c’est exactement ce que font les petits gars de Rouen dans l’acoustique et joyeux My 20’s, clairement enregistré dans les conditions du live. Ça s’éclate, ça chambre et ça rigole beau faire, conclusion toute en légèreté pour un album rock résolument post-punk aux allures pêchues.
Quoiqu’anxiogène dans son thème général, Life Is Unfair respire l’harmonie et la gaieté par tous les pores, par l’entremise des choeurs symbolisant la musique rock punk, des Sex Pistols à Weezer. Les choeurs de Serj ne sont pas sans rappeler ceux que l’on entend dans le morceau Vivre Libre Ou Mourir des Béru à la toute fin des années 80. Les fans de ce formidable groupe sauront certainement de quoi il retourne.
Être français et pondre du bon gros rock peuvent se révéler compatibles, les Rouennais de Dye Crap viennent d’en apporter la preuve avec Life Is Unfair, l’un des albums les plus explosifs de cette fin d’année.
L’éponyme Dye Crap valait déjà le détour, Life Is Unfair fait entrer le quatuor normand dans une autre dimension, post-punk celle-ci et il n’est pas superflu d’affirmer que Dye Crap livre, avec cette seconde galette, une prestation de haute volée. L’opus Dye Crap était bon, mais Life Is Unfair le dépasse allègrement et fait du quatuor rouennais la sensation rock hexagonale avec laquelle il faudra encore plus compter dans les années à venir. On peut toujours s’améliorer d’album en album, Dye Crap l’a bel et bien confirmé!
Life Is Unfair: un album qui vit, pense et respire rock jusqu’à plus soif!
Notre sélection: Homesick, Cheers Neighbor, Serj, Scatterbrain.
