Quand certains mettent parfois plus de trois ans pour pondre un album, d’autres remettent ça quelques mois après une parution. Tom Morello fait partie de la seconde catégorie, guitariste très prolifique en cette période. The Atlas Underground Fire est à peine sorti (15 octobre) que The Atlas Underground Flood vient de voir le jour. Pour ce nouvel opus, le principe ne varie guère, Tom s’étant entouré de grosses pointures de la musique telles que Kirk Hammett (Metallica), Jim James (My Morning Jacket) ou encore Ben Harper. À l’instar de The Atlas Underground Fire, The Atlas Underground Flood a été enregistré durant la pandémie et sans ingé son à portée de main. Tom Morello s’est occupé de ses parties guitares dans son home studio de Los Angeles puis, pour chaque participant, a envoyé les partitions propres de chaque morceau.
« The Atlas Underground Flood termine ce que The Atlas Underground Fire a commencé » a déclaré le guitariste. N’aurait-il pas été plus simple, sachant que les morceaux datent tous de la même période, de sortir carrément un double album d’une seule traite? Peut-être, toujours est-il que ce second album en l’espace de trois mois est bien là et cela pour notre plus grand plaisir!
Tom Morello, fan inconditionnel des Clash, n’hésite pas à faire référence à ce groupe emblématique: « Fire et Flood sont mes London Calling » dit-il. Tom précise également avoir voulu forger une vision centrale par l’apport d’une ambition musicale forte et de grande envergure: Rodrigo Y Gabriela figurant sur la même tracklist que Kirk Hammett, qui l’eût cru? Il n’y a que Tom Morello pour réaliser un tel coup de maître et force est de constater que le pari était osé! Projet fou mais qui fait pourtant de The Atlas Underground Flood, comme d’ailleurs de son prédécesseur, un album bourré de diversité et rassemblant tous horizons.
Avant la sortie de cet album, trois singles ont été dévoilés, à savoir Raising Hell avec Ben Harper, le très rock Hard Times en featuring avec Nathaniel Rateliff mais aussi Jim Jones et Chipotle Joe, sans oublier le bien pop Human sur lequel Tom est flanqué de Barns Courtney. Un morceau qui n’est pas le meilleur des trois, cette distinction étant dévolue à Raising Hell. Ben pour la voix et Tom pour la partie guitare en font une compo remplie d’émotion et de joie tout à la fois. On ne prendra pas grand risque en affirmant que Raising Hell est le plus beau morceau de ce second effort avec You’ll Get Yours en featuring avec X Ambassadors et aussi The Lost Cause avec Manchester Orchestra.
N’en déplaise aux amateurs de chansons bien construites, The Atlas Underground Flood réserve aussi une place prépondérante aux instrumentaux et aux morceaux bien rock, comme par exemple Ride At Down qui voit l’apparition de Breakcod (presque un morceau de boîte de nuit) et A Radical In The Family avec San Holo, morceau servant d’ailleurs d’introduction à l’album. Les voix, on les entend mais en peu de mots sur I Have Seen The Way en featuring avec Kirk Hammett, Alex Lifeson de Rush et Dr. Fresh ainsi que sur Hard Times. Ça chante peu et toujours la même chose mais, au niveau guitare, quelle efficacité! De surpuissants riffs dans lesquels la guitare tantôt gronde, tantôt couine. C’est l’effet Morello, grandes causes et grandes conséquences! Le talent de Tom n’est désormais plus à démontrer et sa réputation plus à faire.
Retour aux compos pop émouvantes avec You’ll Get Yours où X Ambassadors se colle à l’exercice du featuring, tout comme Andrew McMahon In The Wilderness sur The Maze et Jim James dans Parallels, sans bien évidemment parler du somptueux Raising Hell que l’on peut considérer, dans son interprétation, comme une exhortation à être tous frères, à s’entraider. Une chanson émouvante certes mais truffée de gaieté et de sentiments positifs!
Warrior Spirit, avec Rodrigo Y Gabriela, conclue l’album tout en guitare sèche et en légèreté. Sur ce morceau épilogue, Tom Morello apparaît quelque peu en retrait, comme effacé, sans doute éprouvait-il le besoin de souffler. Warrior Spirit fait un peu tache et décalé au milieu des autres morceaux mais tant pis on s’en accomodera.
Les albums de Tom se suivent et se ressemblent, en bien précisons-le d’emblée. Faire cohabiter des artistes d’horizons différents sur un seul album n’était pas chose aisée mais pas pour autant irréalisable, ce que Tom Morello a une fois de plus prouvé. Impossible n’est pas Morello, c’est le nouveau proverbe créé pour dire que rien ne peut résister à cet orfèvre de la guitare, pas même de réunir Ben Harper et Kirk Hammett dans le même tracklisting, aussi bien qu’Idles sur The Bachelor et Manchester Orchestra (The Lost Cause). Avec The Atlas Underground Flood, Tom Morello poursuit sur sa lancée et confirme tout son potentiel de guitariste patenté. Il persiste et signe!
-Jean-Christophe Tannieres