Moment incontournable dans l’agenda musical automnal, et ceci depuis plusieurs années, le festival Détonation a une nouvelle fois répondu aux attentes du public, le festival affichant complet pour chaque soir. Retour sur la soirée de samedi, où la programmation a tenu toutes ses promesses.
La soirée débute avec l’électro pop charmante et délicate de Voyou, nouveau projet de Thibaud Vanhooland, auteur-compositeur-interprète passé par les groupes Elephanz ou Pégase. Entre poésie urbaine et conte moderne, secondé par des chœurs féminins et des cuivres, cette subtile alchimie musicale donnent des titres faussement naïfs et enjoués, comme les bruits de la ville. Décontractés et attentifs au public, les musiciens délivrent un set remarquable, où le spectateur semble avoir en permanence la tête dans les étoiles, où flotte un air de Sébastien Tellier. Autre moment de grâce, lorsque les choristes chantent le nom de chaque musicien, des techniciens et des autres membres du collectif absent pour cette date bisontine. Un chouette moment, tout simplement.
Changement de registre avec la Fat White Family, assurément un des groupes particulièrement attendus de la soirée. Les Anglais est en place sur la scène Étincelle, alternant titres anciens – tel I am Mark E. Smith, et d’autres plus récents tirés de leur troisième album sorti cette année. Le groupe réussit remarquablement bien à transposer sur scène leur musique à la fois exigeante, parfois expérimentale et souvent déroutante. Il est toutefois dommage que le public n’ait pas forcément répondu présent, le froid, la concurrence présente – et surtout à venir – pouvant l’expliquer, tout comme la programmation qui faisait plutôt la part belle à des groupes disons plus festifs. Nous aurons toutefois plaisir à les revoir ultérieurement, dans des conditions plus favorables.
Difficile cette année de ne pas avoir échappé au « phénomène » Jeanne Added. Récompensée aux victoires de la musique, c’est en qualité de grosse tête d’affiche que la jeune femme monte sur la grande scène pour sa dernière date de l’année. Toujours aussi dynamique, spontanée et élégante, elle se livre totalement et conquis rapidement son public en interprétant ses titres pour lesquelles on peut presque parler de classiques, comme It, Mutate ou Both Sides. Déjà venue pour Générik il y a quelques années, où elle avait déjà impressionné les spectateurs et l’équipe de Sensation Rock, elle délivre ici un concert de grande qualité et très généreux, avec un rappel plus que désiré par le public. Nous profitons de ce moment pour nous échapper afin de voir la fin de la prestation de Dombrance faisant danser la foule avec des titres égrenant des noms d’hommes politiques français, et se placer pour une autre jeune artiste également attendue ce soir.
Il est près de 23h40 lorsque Mattiel prend possession de la scène, devenant « sa » scène. Ses balances au son de Guns of Brixton avait déjà donné le ton en quelque sorte : la jeune femme n’a pas peur de grand chose. Ce fut en tout point une prestation époustouflante, sans temps mort, avec un son très rock et une énergie enthousiasmante. Son regard intense, ses vêtements tout en noir et ses sourcils charbonneux ajoutent encore au charme opérant. Je ne me connais pas résume finalement assez bien le ressenti de ce concert flamboyant et à l’énergie folle, ce que nous pouvons qualifier de manière moins ésotérique par une bonne claque.
Si la programmation est un art subtil et délicat, réceptacle de nos critiques et de nos propres états d’âme, c’est toujours la même interrogation au moment d’apprendre que Salut c’est cool est programmé dans un festival. Déjà aux Eurockéennes nous étions sceptiques, disons que nous n’avons pas changé sur ce point de vue. Vouloir faire du mauvais goût un art total, entre Eurodance et blagues potache, est un projet qui rencontre un large succès populaire et des milliers de danseurs improvisés à chacune de leur prestation et que nous respectons.
Disons que nous restons tout de même quelque peu hermétiques à ce genre musical, les plus courageux restant sur place pour voir le groupe Stolen, un des derniers programmés de cette belle soirée musicale.
Un grand bravo aux organisateurs de ce festival toujours aussi éclectique, audacieux et percutant dans ce cadre superbe, avec un public toujours fidèle et curieux. La croissance de ce festival est sans doute loin d’être finie, ce qui amènera des débats futurs notamment sur les acteurs et le financement. En tout cas, les multiples détonations sonores vues et entendues lors de cette édition ne peuvent que plus que jamais nous faire aimer la rentrée musicale dans la belle capitale comtoise.
-Julien Lagalice
crédit photos: Benoît GILBERT