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BRIAN JONESTOWN MASSACRE, Third World Pyramide

Sorti il y a presque deux mois, voici un timing raccord avec l’image véhiculée par  Brian Jonestown Massacre pour chroniquer son quinzième LP, Third World Pyramide. Ce dernier-né issu de l’esprit fécond d’Anton Newcombe est un disque à la croisée des chemins. Écartelées entre mélodies exquises et un indélébile caractère psyché surf, ces 9 pistes tiennent de la maturité artistique (enfin diront certains !) mais également d’une continuité foutraque (soulagement pour les autres). Rien de vraiment révolutionnaire sous le soleil si ce n’est le plaisir d’écouter les nouvelles pépites d’un saboteur professionnel à l’aube de la cinquantaine.

 

Un album inscrit dans la durée …

D’un format relativement court (40 minutes), Third world pyramide est d’abord un disque qui s’insère pleinement dans la discographie du BJM, c’est-à-dire qui  poursuit inlassablement un style psyché et surf music, notamment sur les titres Governement beard, Assignment song et Like describing colors to a blind man on acid. Fils putatif des Velvet Underground et de Spacemen 3, Anton Newcombe dispose d’un atout supplémentaire dans sa manche : la longévité. Chose impensable d’après le rockumentaire Dig !, pourtant BJM c’est 25 ans d’existence (certes avec de nombreux membres congédiés) et une marque de fabrique qui reste invariablement la même : des réverbérations massives sur les voix pleines de tremolos ainsi que sur les guitares, des dissonances (voulues ou non), des claviers très rétro et bien sûr un tambourin quasi-omniprésent (tambourin cher à Joel Gion et justifiant sa présence sur scène). Sur les titres précédemment cités, les paysages sonores sont semblables à d’insécables ritournelles. Le caractère planant et hypnotique se prolonge un peu plus avec la longue plage instrumentale d’Assignment song ; ici l’orchestration est grandiose même. Bref, Anton nous ressert une nouvelle fois sa fameuse recette. Soit dit en passant, une recette reprise et améliorée par nombre de groupes surfant sur la même vague mais avec une irrésistible envie de réussir (voyez les Dandy Warhols, Tame Impala, MGMT ou Allah-Las pour ne citer qu’eux).

 

… et flirtant avec de nouveaux horizons.

Artiste culte mais éternellement insatisfait, le quadra papillonne et butine en continu depuis les années 2000, avec plus ou moins de réussites. Dépassant le style psyché surf tout en le conservant (principe philosophique de l’Aufhebung, terme d’ailleurs repris pour l’album de 2012, Aufheben), le frontman a badiné quelques années en parallèle avec l’électro (jusqu’en 2010 avec le disque Who killed Sgt. Pepper ?) ce qui transpire dans la chanson éponyme. Cet hymne enlevé et lorgnant vers la new wave est remarquable notamment pour son décalage total avec le reste de l’album. Du grand Newcombe. Mais ce touche-à-tout est d’abord un amateur de pop d’inspiration british. Privilégiant la musique au chant (qu’il cède volontiers à deux reprises aux voix féminines et suaves de Tess Parks et de Katy Lane sur Good mourning et Third world pyramide), il requiert les services de cuivres sur Don’t get lost et de cordes léchées (Good mourning, Assignment song ou encore la très beatlesienne Sun ship) pour s’élever au rang des grands compositeurs de pop songs (au sens noble du terme). Et finalement, après cette vraie-fausse B.O. de film imaginé publiée en 2015, le Maître ès sabotage de groupe a prouvé qu’il était doué pour les musiques à destination du 7e Art. Deux titres instrumentaux s’y prêteraient à merveille : Oh bother conviendrait sans nul doute à un western et Lunar surf graveyard à un film d’espionnage. En résumé, le potentiel de ce bourreau de travail semble sans fin.

 

Dans le petit monde des hyperactifs notoires, comptant entre autres Jack White, Dave Grohl ou Josh Homme (liste non exhaustive et totalement subjective), Anton Newcombe tient toujours une place de choix. Passé les années 2000 et son cortège d’errances personnelles et musicales, l’homme s’est assagi. 49 ans au compteur, jeune marié et un statut d’artiste culte à entretenir, ou à enterrer. Que faire ? Cet opus met en lumière toute son ambiguïté et ses incertitudes. Désormais posé dans ses studios berlinois, il confirme sa capacité à pondre des mélodies remarquables, des chansons grandiloquentes sans renier son identité psyché et dilettante. Pour faire simple, Third world pyramide est un mélange savoureux de torchons et de serviettes. Deux pas en avant, un en arrière… toute la philosophie du BJM afin de ne pas réussir trop vite, même un quart de siècle après ses débuts.

 

  • Benoît GILBERT

Artiste : BRIAN JONESTOWN MASSACRE

Album : Third world pyramide

Label/distribution : ‘A’ Recordings

Date de sortie : 28/10/2016

Genre : rock psychédélique / surf pop

Catégorie : Album rock

 

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