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Live report – The Libertines, La Rodia, mercredi 12 février 2025

Fantasmée et tellement inespérée, cette rencontre entre le groupe culte du début des années 2000 et la cité bisontine – seules cinq dates françaises couvraient la tournée du groupe – nous a fait passer par toutes les émotions, mais demeurera inoubliable.

Il est près de 21 heures quand nous arrivons sur place, avec beaucoup de monde (le concert est annoncé complet depuis pas mal de temps), habillé de perfectos, de tee-shirts à l’effigie du groupe, et le tout avec une excitation palpable. C’est un peu d’histoire du rock de ce siècle qui vient à nous ce soir, justifiant à la fois curiosité et impatience.

Arrivés sous un tonnerre d’applaudissements, les musiciens prennent place : John Hassall et Gary Powell assurent toujours à la basse et à la batterie, mais la surprise vient de Pete Doherty, qui s’affale sur un fauteuil en bord de scène avec sa guitare. Carl Barât devient le frontman qu’il a toujours rêvé d’être. C’est dans cette configuration étonnante que le set débute avec le formidable The Delaney – on ne croit toujours pas, plus de vingt ans après, qu’il n’était qu’une face B –, What Became of the Likely Lads, le récent I Have a Friend – qui s’inscrit pleinement dans la lignée de ses glorieux prédécesseurs – ou l’indémodable Boys in the Band, qui permettent au groupe de rappeler à quel point il demeure incontournable.

Les musiciens prennent peu à peu leurs marques, on s’habitue au profil de Peter, affaibli : dans un français pittoresque et hésitant, Carl explique un accident récent empêchant le chanteur d’être debout sur scène. Sourires garantis, et cet éclaircissement rassurant, dans un décor reprenant la couverture du dernier album, donne un contexte encore plus proximal et intime aux titres. What Katie Did, qui nous fait penser à The Clash, et les récents mais non moins magnifiques Baron’s Claw ou Shiver prennent ici toute leur mesure et leur épaisseur.

Les musiciens se dévoilent, s’amusent, Pete se lance en anglais dans un monologue savoureux magnifiant la citadelle, ce « beautiful castle », selon ses termes, ou improvisant un « Joyeux Anniversaire » à la guitare pour une fan qui a sans doute vécu son quart d’heure de gloire warholien. Music When the Lights Go Out rappelle que Doherty est aussi un incroyable compositeur, et se montre une rampe de lancement idéale à un enchaînement fabuleux comprenant Up the Bracket, avec un Carl Barât déchaîné, Run Run Run, à l’efficacité déjà redoutable sur scène, puis le classique Can’t Stand Me Now. Nos deux compères à la guitare, qui ont tout connu ou presque entre passion, excès et haine, semblent désormais en paix : plus touchants que jamais, ce titre absolu n’en est que plus beau. Harmonica compris.

 

Impossible de se quitter si vite, et le (riche) rappel de six titres s’impose comme une évidence. Et quel bonheur d’entendre, comme à la plus belle heure, What a Waster, Gunga Din ou Time for Heroes. Don’t Look Back into the Sun offre le titre parfait pour se quitter : urgent, électrique et un brin nostalgique (mais pas trop). Mais il est difficile de se quitter vraiment, le groupe lui-même prolongeant les applaudissements et saluant longuement les spectateurs ravis. « Étrange chose que l’homme qui souffre veuille faire souffrir ce qu’il aime », écrivait Musset dans Confession d’un enfant du siècle, incarné il y a quelques années au cinéma par Doherty. Mais depuis ce soir, les Bisontins aiment ce dernier encore plus.

Crédits photos : Frank Laithier.

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