C’est l’histoire d’un homme que l’on pensait perdu pour la musique, pour cause de maux de gorge à répétition et d’une voix enrouée. Cette histoire est celle de l’Américain Zach Condon, que l’on connaît davantage sous le nom de Beirut.
À ces problèmes de gorge, se sont greffés un état dépressif et un mal-être chroniques dont l’auteur interprète de Santa Fé a eu énormément de mal à se remettre.
Le dernier album de morceaux inédits de Beirut remonte à 2019, il s’appelait Gallipoli. Début 2022, un best of baptisé Artifact était quand même sorti dont furent extraits les singles So Slowly et surtout ce magnifique Fisher Island Sound.
De façon à entamer les meilleures guérison et convalescence possibles, le songwriter américain est parti en Norvège pour se ressourcer et faire le point dans un premier temps, se réinventer même. Sa destination précise fut le petit village d’Hadsel, situé sur l’archipel des îles Vesteralen, dans le Nord de la Norvège.
Un voyage qui, pour Beirut, n’a cependant pas été que du tourisme et du farniente, puisqu’un album en a découlé, comptant 12 nouveaux morceaux tous composés dans ce cadre enchanteur dominé par les fjords, les montagnes et les aurores boréales.
Cet album, paru via Pompeii Records, s’intitule tout simplement Hadsel, lieu indéniable de la renaissance vocale et discographique de Zach Condon.
Oddvar, un collectionneur d’orgues norvégien, fut pour l’américain d’une aide précieuse en mettant à sa disposition la Hadsel Kirke, une structure en bois datant du 19e siècle avec, en supplément, un orgue d’église de l’époque.
À ces parties d’orgue enregistrées via un magnétophone autrichien, Beirut n’a plus eu qu’à ajouter la trompette, les cuivres et les synthétiseurs qui ont, depuis les débuts, constitué son univers balkanique autant que folklorique.
Durant ce séjour à Hadsel, Beirut s’est réfugié dans la musique comme perdu dans la contemplation des fjords et aurores boréales, des paysages à la beauté impressionnante. Un cadre idyllique qui a, semble-t-il, permis à l’Américain d’évacuer en totalité les maux qui le torturaient.
Sur ce nouvel effort de Beirut, pas de rythme ni de cadences infernales, juste du repos et de somptueuses ballades interprétées selon les divers habillages musicaux mais avec, en point commun, cette voix ensorcelante de Zach Condon. Seul Melbu est instrumental.
Hadsel accueille aussi bien la guitare sèche (Baion, So Many Plans, Island Life) que les sonorités électroniques (Stokmarknes, The Tern, January 18th ou encore Spillhaugen). Une orchestration qui tend donc, au fil des morceaux, à se diversifier quelque peu.
Comme toujours, Beirut a cette capacité d’émouvoir son auditoire, de le toucher au plus profond de l’âme, ce qui fait de ce songwriter américain un interprète à part dans la musique. Émotion à fleur de peau par exemples sur l’éponyme Hadsel, Arctic Forest, Island Life ou même Spillhaugen, lorsqu’on ne parle pas du single So Many Plans dévoilé bien avant la sortie de l’album.
Une voix grave, douce, veloutée, le tout additionné charismatique: tout le charme de Beirut. Sur Hadsel, le timbre de voix de l’Américain ne souffre d’aucune altération, comme si ses maux de gorge n’avaient jamais existé. On se remémore alors avec bonheur et délice Nantes ou plus récemment Fisher Island Sound.
La Norvège est donc le fil rouge et conducteur d’Hadsel, ayant inspiré ses 12 morceaux. À sa suite, par ce nouvel opus, Beirut nous invite au voyage, à l’exploration de ces contrées nordiques éloignées, solitaires même. Tout ce qu’il fallait au songwriter américain pour composer en toute quiétude, sans être importuner par qui que ce soit et force est de constater que bien en a pris à ce surdoué de la musique, puisqu’il résulte d’Hadsel la pleine réussite. Couleur locale très présente par le biais du morceau titulaire Hadsel évidemment, mais aussi Spillhaugen, Island Life et Arctic Forest.
Hadsel: la carte tant postale que musicale de paysages norvégiens féeriques!
Notre sélection: Island Life, Baion, So Many Plans, Arctic Forest.