Revoilou nos petits chouchous, les bordelais de Blackbird Hill. Le duo toujours formé de Maxime Conan (chant, guitare) et de Théo Jude (batterie, chant) nous gratifie de son second album qui a pour titre Embers In The Dark.
En 2020, Blackbird Hill faisait sensation avec Razzle Dazzle, très convaincant premier opus. On pouvait y retrouver des morceaux tels que le génial “Waterie Eyes”, “Smoke And Mirrors” ou encore les explosifs “On The Rocks” et “Two Wolves” qui valurent, à nos chers bordelais, le surnom de «Royal Blood français» et force est de constater que ce n’était pas usurpé !
Le 7 octobre, sous le label Lagon Noir, est donc paru Embers In The Dark, traduction « des braises dans le noir. » Un second effort mixé par les soins de Thomas Seccato (Cryogène Prod) et masterisé par Alexis Bardinet (Globe Audio Mastering).
Exit les influences Royal Blood sur Embers In The Dark, le tandem Conan/Jude s’est tourné vers Queen Of The Stone Age et plus encore les belges de Triggerfinger. On ne perd pas au change avec de telles influences, malgré le visible déroutement de certains inconditionnels de la première heure. À la décharge de Maxime et de Théo, il faut reconnaître que, depuis Razzle Dazzle en 2020, le climat général s’est assombri (Covid, tensions, perpétuel mécontentement de la politique menée et tutti quanti). Blackbird Hill a donc dû se calquer sur l’air maussade du temps, se réinventer, se remettre en question. Quasiment un départ de zéro alors que tout était si bien parti avec Razzle Dazzle.
« Nous avons été stoppés dans notre élan quand notre monde s’est arrêté de tourner. Alors nous avons pris le temps de souffler, de puiser en nous ce dont nous avions besoin pour franchir un cap et, d’une certaine manière, nous construire un monde différent. » Une citation qui, à elle seule, résume fort bien l’état d’esprit dans lequel se trouvait le duo aquitain avant d’enregistrer Embers In The Dark.
Un album noir, sombre et mélancolique certes mais qui n’est pas néanmoins dépourvu de morceaux rock sulfureux. On évoquait les braises, c’est justement le brûlant Reset qui ouvre le feu. En quelques clinquants riffs de guitare et beats de batterie, Maxime et Théo impriment le tempo, manifestement pressés d’en découdre. De single, Reset est devenu un tube qui, à coup sûr, marquera la carrière de Blackbird Hill, à l’instar de la superbe ballade “Keep Up Until It Bleeds” dont le clip fut l’oeuvre de Tchaz Locke, ami très proche de Blackbird Hill et accessoirement chanteur/guitariste de Steve Amber.
“Keep Up Until It Bleeds”, de caractère mélancolique, traite de la culpabilité ressentie dans les choix que nous faisons et des réactions d’autrui motivées par ceux-ci. Des paroles lourdes de sens, graves à l’extrême, saisissant contraste avec la beauté musicale de ce magnifique morceau où les guitares grondent et s’improvisent en basses.
Embers In The Dark, en dépit de la mélancolie ambiante qui y règne, se veut être un album rock qui tape bien, qui envoie du bois. Reset en fait d’emblée la démonstration, suivi par l’éponyme Embers In The Dark qui, pourtant, débute comme une ballade. Le calme avant la tempête, le repos des mirettes avant l’emballage déclenché de mains de maîtres par Maxime et Théo. Effectivement, après quelques notes de guitare et quelques vocalises de Maxime, c’est l’incendie : le feu prend et souffle tout sur son passage. En bref, tout s’embrase. Embers In The Dark le morceau est un blues rythmé dans lequel les guitares pleurent à chaudes larmes et donnent en plein dans les graves, tandis que la batterie de Théo s’éclate comme une belle diablesse, ne s’en laisse pas compter.
Les flammes, loin de s’estomper, font encore rage sur l’excellent “Flatline”, l’une des grandes satisfactions de ce second album de Blackbird Hill. Encore un morceau tubesque à ajouter à cette collection de paroles s’insinuant dans nos méninges, à tel point que l’on se prend à vouloir suivre Maxime Conan dans ses périgrinations vocales. Sur “Grapevines”, pour le « Nothing But The True), le même cas de figure se présente. Le duo bordelais possède cette fantastique capacité de créer des paroles entêtantes et inoubliables une fois la première écoute passée.
Si “Reset” et “Flatline” explorent plus avant les caractéristiques du stoner “Grapevines”, à l’image d’Embers In The Dark, revêt tous les aspects du blues, ce dernier marquant les débuts de “The Masquerade” même si, au fil du morceau, le stoner reprend bien vite ses droits. “The Masquerade” qui, selon certaines indiscrétions, aurait pu ne pas figurer sur ce nouvel album de Blackbird Hill, ne convenant pas initialement à l’ensemble des morceaux. Parent pauvre à la base, “The Masquerade” ne cadrait pas, sans mauvais jeu de mots, c’était une mascarade mais, le bon sens l’ayant emporté, celle-ci n’a pas duré et “The Masquerade, morceau à la fois bluesy et stoner, tient sa place sur l’album.
Autre grand moment d’Embers In The Dark avec “Beat The Retreat”, lui aussi fabriqué dans un moule de blues. Mélancolie, quand tu nous tiens ! Malgré ce climat sombre, le chant de Maxime Conan apporte aux morceaux à connotation blues cette touche d’éclaircie, ce supplément de vivacité qui en atténuent quelque peu l’obscurité musicale. Et la lumière fut avec Maxime, tant dans “Grapevines” que sur “Beat The Retreat”. Théo, derrière ses fûts, est bien loin d’être largué et, comme de coutume, donne tout ce qu’il a dans les tripes !
Un peu de clarté et de légèreté, au milieu de ce gigantesque incendie attisé par “Flatline” ou “Reset”, ne saurait être de trop. Il y a tout d’abord le reposant “Black Feather” qui pourrait se déguster à la table d’un café, en plein air, une boisson à la main. Le rythme est si lent que l’on s’endormirait, à force de se laisser bercer. Sur cet album, Black Feather est un oasis de lumière, un repos de l’âme des plus salutaires. “The Colder The Better”, en revanche, nous fait replonger dans l’obscurité véhiculée par la musique du duo bordelais. “The Colder The Better” a pour thèmes les guerres contemporaines, au premier rang desquelles figure bien évidemment celle d’Ukraine. Un climat pesant qui, là encore, n’empêche nullement cette ballade d’être appréciée et chantée en choeurs avec Maxime quand vient le fameux « The Colder The Better. » De l’entêtant en veux-tu en voilà, “The Colder The Better” se met en devoir de nous l’offrir.
Comment ne pas revenir sur la troisième de ces ballades, à savoir “Keep Up Until It Bleeds” qui, soit dit en passant, a l’insigne honneur de conclure Embers In The Dark. Ce n’est aucunement un hasard si “Keep Up Until It Bleeds” a été choisi comme single : paroles critiques, musique lancinante et voix de Maxime émouvante à fleur de peau. “Keep Up Un til It Bleeds”, plus qu’un tube de Blackbird Hill, devrait indéniablement truster les sommets des classements réservés aux slows.
Embers In The Dark, par son côté sombre et mélancolique, a pu surprendre et parfois même dérouter mais, chez Blackbird Hill, le feu sacré et la flamme ne se sont pas évaporés. En dépit du climat négatif qui a gangrenné la France et le reste du monde, Maxime et Théo ont toujours gardé en eux cette foi en la musique, le secret espoir que les choses ne peuvent aller que de mieux en mieux, qu’elles ne pourraient être pires. “Flatline”, “Grapevines” ou encore “Reset” sont les symboles de ces quelques brindilles d’optimisme qui, en aucun cas, ne seront jetées dans les braises de l’incendie.
Embers In The Dark : que brille perpétuellement la flamme, que le feu brûle toujours dans les veines comme dans la musique de Maxime et de Théo !
Notre sélection : Flatline, Beat The Retreat, Reset, Grapevines, Keep Up Until It Bleeds.