Le leader de Pearl Jam est de retour en solo et cette fois-ci pour un véritable LP. Eddie Vedder nous avait habitué, dans son parcours solo, à des ballades guitare sèche/voix à l’image de la BO du film Into The Wild. Avec Earthling, les fans de Pearl Jam ne seront pas le moins du monde dépaysés, il y en a pour tous les goûts : du grunge comme le combo de Seattle sait nous en pondre et même de jolies ballades pour fêter la Saint-Valentin! Sur cet album, Eddie Vedder n’a pas tout fait seul, s’entourant de quelques prestigieux invités tels que Chad Smith (batteur des Red Hot), Josh Klinghoffer (guitariste de la même formation entre 2010 et 2019), mais aussi d’Elton John (avec qui Eddie Vedder avait déjà enregistré un morceau dans le cadre d’un album de duos du britannique), Ringo Starr et Stevie Wonder (incroyable mais vrai)!La production a été l’affaire d’Andrew Watt et la distribution assurée par le label Seattle Surf. On ne renie pas sa marque de fabrique ni ses origines, c’est bien connu, cela n’a jamais été aussi véridique pour Eddie Vedder car, sur les 13 morceaux composant ce LP, bon nombre font penser à du Pearl Jam pur souche avec les bonnes guitares qui vont bien. Du post-punk au grunge, l’ADN des petits gars de Seattle. Parmi ces morceaux puissants, on peut citer Power Of Right, Rose Of Jericho pas mal bourrins mais surtout Try, encore plus trépidant et qui fait monter l’adrénaline d’un cran. C’est justement sur Try que Stevie Wonder accompagne Eddie à l’harmonica. Duo qui paraissait improbable et inimaginable et pourtant! Dans la musique, tout peut s’avérer possible : le morceau le plus pêchu de l’album avec Stevie en invité de marque, avouez que c’était un pari osé de la part du leader de Pearl Jam. The Dark, autre bon morceau bien rentre-dedans, se compare précisément à Dancing In The Dark de Bruce Springsteen. Écoutez les deux morceaux l’un après l’autre et vous constaterez qu’il y a de grandes similitudes, tant par le mot « Dark » dans le titre que par la musique. Dans la voix d’Eddie Vedder, on y lit depuis toujours une vive émotion, ce quelque chose de particulier que d’autres n’ont pas. Même sur l’explosif Brother The Cloud qui fait bourdonner les guitares à gogo, cette voix est à fleur de peau, émotive. Dans Brother The Cloud, Eddie évoque la perte d’un être cher, d’un ami, dont il a eu (et a encore) du mal à se remettre. Optimiste musicalement, ce morceau se révèle poignant dans les paroles. Émotion encore et toujours avec les ballades Long Way sur lequel clin d’œil vocal est fait à un certain Aldebert (même si Eddie et Guillaume ne se connaissent certainement pas), Mrs Mills où s’entendent un piano et des cuivres, un morceau très estampillé Beattles. Il n’est d’ailleurs pas innocent de noter, sur Mrs Mills, la présence de Ringo Starr derrière les fûts. On aurait pu tout aussi bien imaginer Paul McCartney accompagner vocalement Eddie Vedder, ça en aurait jeter encore davantage! Sur Picture, autre belle ballade, c’est Elton John qui se prête au jeu du duo et qui réussit très bien l’exercice. Il faut dire qu’Eddie et Elton se connaissent sur le bout des doigts pour avoir, on l’a dit, déjà chanter ensemble. On My Way met en lumière Edward Severson, le propre père d’Eddie Vedder que ce dernier n’a jamais connu mais que Pearl Jam évoque dans Alive. Sur On My Way, on entend un enregistrement de la voix de ce père absent physiquement mais tellement présent par la pensée. Pour rassembler ces enregistrements, ce fut pour Eddie un travail de longue haleine qui, toutefois, en valait la peine dans le but de la réhabilitation d’Edward Severson. Trois singles sont extraits d’Earthling : Long Way, The Haves (magnifique ballade qu’il serait bien impardonnable de passer sous silence) et cet étourdissant (tant par l’abondance de guitares que par l’émotion véhiculée par la voix d’Eddie) Brother The Cloud. Un contraste qui exprime à lui seul la variété et la richesse musicale de cet album. On note aussi une incursion dans l’électronique avec Invincible, à mi-chemin entre le rock et la ballade. Invincible est le juste milieu, la frontière entre les deux styles musicaux de Pearl Jam, le groupe de Seattle qui manifestement demeure indissociable d’Eddie Vedder, même dans sa carrière solo. Earthling était attendu au tournant et, le moins que l’on puisse dire, c’est qu’Eddie Vedder n’a pas déçu cette attente. Long Way, The Haves et Brother The Cloud annonçaient déjà la couleur, somptueusement complétés par The Dark, Mrs. Mills, Power Of Right ou encore l’énorme Try. Il est peut-être un peu tôt pour effectuer un classement des albums de l’année mais nul doute, à l’écoute des 13 morceaux qu’il comporte, qu’Earthling pourra prétendre à en viser les hauteurs. Earthling d’Eddie Vedder : pratiquement du Pearl Jam mais sans d’autres membres que Mr Eddie!