Reconnaissons d’emblée que le métal, ce n’est pas forcément la tasse de thé, ni le cœur de Sensation Rock. Nos oreilles prudes ne sont pas nécessairement habituées à une telle intensité.
Ô joie, ô dieux du métal hurlant, le dernier album des frangins Joe et Mario Duplantier vaut largement une écoute attentive.
Fortitude se traduit par courage, détermination. Et c’est effectivement ce qui transparaît au travers des 11 titres de ce dernier opus.
Cantonner le métal à du bruit et de la technique, ce serait passer à côté de l’intégralité et de l’intégrité de ce groupe. Engagement et onde positives, voilà ce qui compose ce combo de musiciens très progressifs, au sens noble du terme. Écoutez attentivement Amazonia, et vous comprendrez vite que le propos n’est absolument pas dénué de sens, de contexte et de revendications.
Gojira, ce sont 4 musiciens engagés, dans tous les aspects de la vie actuelle ; environnement, écologie, répartition des richesses. On ne peut que saluer et respecter ce que représente ce groupe en constante évolution. Bien sûr, si vos cages à miel ne sont pas acclimatées, cela peut vous paraître dénué de musicalité et d’intérêt. Il n’en est rien, vraiment rien. Allez écouter Into the storm, et vous comprendrez toute la dimension que ce groupe peut prendre.
De glorieux prédécesseurs comme Sepultura, Rage againt the Machine sont passés par là. Tenter de s’émanciper du genre pour transmettre un message. Et bien, Gojira y parvient. Comme une nouvelle ère qui s’ouvrirait au metal.
Rien n’est gratuit, rien n’est laissé au hasard. Si ce n’est peut-être pas le meilleur opus de la bande (ma préférence va toujours et encore à Magma), il faut reconnaître que Gojira insuffle un vent nouveau dans ce style. On adore les guitares moins lourdes qu’à l’ordinaire, et le jeu impressionnant de Mario à la batterie. Quel défi physique ce doit être de jouer sur scène le répertoire de ce groupe.
Rappelons-le, Gojira est l’un des groupes français qui s’exporte le mieux ! Y compris et surtout aux États-Unis, là où très peu d’artistes tricolores peuvent affirmer avoir percé.
Another world, un autre monde. On rêvait d’un autre monde, où la lune serait blonde…Gojira ne chante pas autre chose que cela, le malaise de la surconsommation, de la dégradation des conditions de vie par notre faute commune.
Hold on quant à lui est plutôt différent de l’ADN du groupe ; c’est (presque) doux et feutré, les thèmes de la noyade et de la lutte y sont sans doute pour quelque chose. La douceur s’étiole vers 1’40’’, laissant place à une rage de vivre, à une ivresse nihiliste. Et les riffs ravageurs emplissent l’océan, nous laissant alors entre deux sentiments ; le renoncement ou le combat.
Fortitude, titre éponyme de cet album, fait figure de pause, d’instant de méditation. Mélodie à bas tempo, chœurs enlacés, deux minutes d’abandon. Et puis le combo enchaîne sur The Chant, une transition habile puisque la mélodie semble écrite à la suite de Fortitude. On convoque les chants autochtones nord-américains, et la beauté de leurs civilisations, la vie avant la vie, la culture avant la culture majoritaire. C’est incontestablement le titre le plus entendable de cet album pour de béotiennes esgourdes. Mais, manants, hommes de peu de foi, entrez en religion metal, et vous comprendrez que les stéréotypes du genre ne sont là que pour mieux préserver l’immense richesse de ce courant aux mains d’une frange bienheureuse de la population.
Bien sûr, Silvera restera à jamais comme l’un des sommets de ce que le métal français aura pu produire. Mais restreindre Gojira à ce seul morceau de bravoure, ce serait faire injure à l’intégrité de ces hommes. Et franchement, pour une fois qu’un groupe français n’est pas regardé outre-atlantique comme un OVNI, soyons reconnaissants à Gojira de renouer avec les valeurs de la République : Liberté, Égalité, Fraternité.
Source : Metal Zone (https://www.metalzone.fr/news/156120-gojira-fortitude-album-plus-vendu/)