L’Australie a aussi ses folkeux, ce n’est pas que le pays d’AC/DC et d’Airbourne. Côté féminin on connaissait déjà Sarah Blasko, pour le sexe masculin voici désormais Daniel Trakell, la révélation indie folk de cette fin d’année.
Daniel est originaire de Melbourne et tente de se faire une place dans le monde musical depuis trois ou quatre ans, sans hélas réellement y parvenir. Ses modèles et influences sont multiples, allant de Fleet foxes à Elliott Smith en passant par Nada surf, la voix du jeune australien se rapprochant de celle de Matthew Caws. On peut aussi chercher des intonations à la Jonathan Wilson, voire Jake Bugg à certains moments.
Le songwriter de Melbourne était déjà auteur de quelques compos telles que Paradise et Wasted light en 2017. A présent, c’est un LP de dix morceaux dont il nous gratifie et qui a pour titre Warning bell.
Un album enregistré à Nashville en majeure partie, sous la houlette de Joshua Barber et de Gretta Ray, personnes avec qui Daniel a noué de fortes amitiés durant les diverses sessions de travail. Puis retour en Australie pour la touche finale, le jeune folkeux recevant le concours de son compatriote Gotye, ancien songwriter à succès, bien que les deux hommes n’aient pas pour autant chanté ensemble.
Warning bell fait la part belle aux compos romantiques dans lesquelles, s’entendent autant qu’elles se lisent, des paroles empruntes d’une somptueuse poésie et d’une poignante émotion, le tout véhiculé par la voix enjôleuse et frêle de Daniel Trakell. De Wisdom/Boredom qui le débute à So long le concluant, Warning bell nous ensorcelle et tisse sa toile en nous telle l’araignée dont on seraient les proies toutes désignées. Dès Wisdom/Boredom, on entame un formidable voyage à travers les mots, qu’ils évoquent l’amour ou des thèmes personnels. Daniel Trakell n’a rien à envier aux grands poètes et songwriters de toutes époques confondues comme Bob Dylan et Neil Young pour ne citer qu’eux.
Sur le plan musical, Warning bell regorge de fabuleux morceaux interprétés en tandem guitare sèche/voix, comme qui dirait dans les conditions du live acoustique. Absence remarquée de percussions, à l’exception de So long, Oh love et Come to, single extrait de cet opus.
Sur de nombreux morceaux, Daniel est accompagné de majestueux chœurs qui donnent à ceux-ci un supplément d’émotion, bien que la voix du jeune australien n’en soit pas dépourvue. Ces vibrant chœurs s’entendent notamment dans Start again, Me & you ou encore Turn around.
A l’écoute de Oh love, on décèle la présence d’un harmonica qui vient compléter une orchestration déjà bien fournie. Love walls, Quant à elle, met quasiment la guitare au repos et fait place au piano ainsi qu’à quelques cuivres, sans oublier les fameux chœurs qui secondent merveilleusement Daniel.
Sur Warning bell, on ne trouvera que de magnifiques ballades, un adorable son de guitare sèche et la voix de Daniel Trakell laissant paraître pléthore d’influences mais qui dégage une sensibilité à nulle autre pareille, oserait-on même parler de sensualité.
Les entêtantes Let me be et Turn around se détachent d’une forte tête des huit autres compos, revêtant toutes deux un caractère radiophonique qui leur apporte ce petit plus, cette impulsion qui fait la différence. Deux compos où, plus que les autres, se transmet une émotion à fleur de peau par le seul biais de la voix de Daniel quand celui-ci entonne le sacrosaint « let me be « , de quoi vous donner des frissons !
Pour un premier LP, l’examen est réussi et Daniel Trakell est donc reçu avec mention. Warning bell va marquer les esprits et diffuser une bonne dose de bonheur en ces temps quelque peu troublés.
Daniel Trakell, tel un ouragan, a tout bousculé sur son passage jusqu’à se poser en révélation folk incontournable. Pour un coup de maître c’en est un mais le plus dur reste à venir : confirmer et rester soi-même, autrement dit ne pas prendre la grosse tête et ne pas céder aux sirènes des figures de styles imposés par les maisons de disques !
Jean-Christophe Tannieres