Deux ans après avoir sorti un remarquable premier album nommé The Thread, Lysistrata revient nous asséner un second uppercut avec Breathe In/Out. Avec cette deuxième oeuvre urgente et implacable, le jeune trio originaire de Saintes prouve une fois de plus qu’il est certainement le groupe français le plus talentueux et sincère du moment.
C’est en 2013, à Saintes en Charente-Maritimes, que Max (basse), Théo (guitare) et Ben (batterie) forment Lysistrata. Après une poignée de titres dévoilés à la face du monde sur Bandcamp ou encore Soundcloud, le jeune trio est propulsé sur le devant de la scène indie rock française en devenant le lauréat légitime du prix Ricard S.A. Live en 2017. Un épisode charnière dans la carrière de la formation. Dès lors, tout s’accélère. Les Saintais sortent un premier album remarqué chez le label bordelais Vicious Circle en octobre 2017 et enchaînent les concerts en France ainsi qu’à l’étranger. Les publics des plus grands festivals européens (Paléo, Dour, Vieilles Charrues, etc.) se souviennent encore des prestations rageuses et sans concession du groupe. Adeptes d’une musique dont l’héritage évident des 90’s n’est plus à prouver, les trois musiciens explorent les différents recoins du post-hardcore, du math-rock, du post-rock ou encore de la noise pour en tirer un son des plus singuliers. Un cocktail renversant que l’on retrouve naturellement au sein d’un deuxième disque nommé Breathe In/Out.
Different Creatures lance les hostilités et l’on démarre l’écoute de ce nouvel album pied au plancher. Déjà dévoilé par une session live de Sourdoreille, ce premier morceau urgent représente ce que Lysistrata sait faire de mieux. Des moments de rage intenses entrecoupés d’instants plus calmes et introspectifs. La technique des musiciens est toujours remarquable et les voix, chantées et hurlées, sont plus complémentaires que jamais. Un aspect qui servira de fil conducteur à ce deuxième opus. Death by Embarrassment vient prendre la suite et les ingrédients restent les mêmes. L’intensité est maintenue jusqu’à un final des plus libérateurs. La marque de fabrique de la formation. Scissors et Everyone Out, quant à eux, calment un peu le jeu pour mieux exploser. Deux titres qui permettent à l’album de respirer quelques instants contrairement à Boot on a Thistle et Against the Rain, deux bijoux post-hardcore irrespirables mais terriblement addictifs.
En milieu d’album, le sublime Mourn, premier extrait dévoilé par le power trio en juin dernier, vient jouer avec nos émotions. En un peu moins de sept minutes, la chanson nous transporte dans des paysages aux mélodies imparables et aux rythmiques variables. De crescendos en decrescendos, le morceau nous permet de retrouver quelques instants le Lysistrata de Sugar and Anxiety ou encore d’Answer Machine. Quelques instants éphémères stoppés par une longue boucle conclusive que l’on souhaiterait éternelle. Quelques secondes plus tard, End of the Line arrive à nos oreilles. Dès les premières notes et jusqu’à un final très post-rock, la mélancolie est palpable et le groupe fait preuve d’une honnêteté rare. Certainement le sommet de ce deuxième effort. En guise de conclusion, un peu à la manière de The Bow Who Stood Above the Earth pour The Thread, Middle of March et son sample viennent clore les débats. Pendant plus de huit minutes, comme à son habitude, la formation nous propose des montagnes russes menaçantes qui aboutissent sur un dernier tourbillon sonique empli de déflagrations. Avec ces ultimes notes, Lysistrata laisse les choses en suspens et nous donne rendez-vous pour un prochain combat qui, on l’espère, ne tardera pas trop à arriver.
Slint, Rodan, Drive Like Jehu, At the Drive-In, Don Caballero, Unwound, Shellac, Bastro, Bitch Magnet, Fugazi, Shipping News, A Minor Forest ou encore June of 44, les références ne manquent pas lorsque l’on écoute Lysistrata. Mais se risquer à comparer la jeune formation française à tous ces groupes issus de la fin du siècle dernier reviendrait à mépriser le caractère singulier de la musique du trio. Une musique viscérale au sein de laquelle la technique ne vient jamais prendre le dessus sur l’émotion. Les compositions se veulent plus frontales qu’auparavant mais la sincérité des débuts est toujours bel et bien présente et on a hâte de la retrouver sur scène : le terrain de jeu du groupe. Avec Breathe In/Out, Lysistrata signe un deuxième chef d’oeuvre authentique et nécessaire qui devrait trouver grâce aux oreilles de ceux qui aiment la musique. La vraie.
Note : 9/10
- Hugo COUILLARD
Artiste : Lysistrata
Album : Breathe In/Out
Label : Vicious Circle
Date de sortie : 18/10/2019
Genre : Post-hardcore
Catégorie : Album rock