Troisième jour des Eurockéennes pour l’équipe de Sensation Rock, annoncé complet comme la veille, et à nouveau beaucoup de décibels et d’énergie. Aujourd’hui, des risques d’orage sont annoncés sur les Eurockéennes mais n’écoutant que notre courage et notre folie d’Eurockéens, ce sera sans botte ni poncho que nous rejoindrons le site en pleine confiance (et un brin d’insouciance toujours nécessaire pour apprécier notre musique favorite : le rock !).
C’est à nouveau par un spectacle comique que débute cette journée, avec le Comte de Bouderbala dans le rôle de chauffeur de chapiteau. L’artiste joue quelques sketches bien adaptés au lieu, maltraitant les textes des rappeurs et de la variété française, sans oublier quelques piques sur la jeunesse. L’ensemble fait mouche, et cette initiative heureuse est à saluer et sera peut-être reconduite lors de prochaines éditions.
L’antre Eurockéennes, espace de liberté et de musiques… au pluriel oui. D’ailleurs, en parlant musiques au pluriel, le premier artiste que nous allons voir sur la scène de la plage semble bien en avoir fait son fer de lance ! En effet, selon nos sensibilités musicales, on pourra retrouver dans Hubert Lenoir du Prince de par sa taille et vocalement sur certaines parties (notamment sur le refrain de ton hôtel, titre avec lequel il ouvrira son set), du Bowie pour le côté glam et maquillé, du Rolling Stones ou du Primal Scream sur Animal Songs (titre repris de son premier groupe The Seasons). Mixez tout ça avec une subtile touche de provocation lorsqu’il s’amusera à mimer la fin de l’acte sexuel avec une bouteille d’eau ou de descendre langoureusement pour toucher la tête d’un agent de sécurité posté devant la scène et ne se rendant compte de rien et vous obtiendrez le show rafraîchissant et sautillant d’Hubert Lenoir. Alors que Mass Hysteria se fait un malin plaisir de faire mordre la poussière à ses nombreux fans, nous apprécions le cocktail Lenoir sans modération.
Mass Hysteria débutent leur set à 18h30 sur la grande scène. Habitué du festival – cette édition correspond à leur sixième venue -, le groupe n’a rien perdu de son énergie et de sa fougue. Mouss Kelai saute dans tous les sens, demande au public de faire des cercles provoquant une véritable tempête de poussière. Les textes demeurent extraordinairement actuels, d’autant plus qu’avant le déluge de guitares, le groupe rend hommage aux victimes des attentats de 2015 sur l’enfer des dieux, ou salue les Gilets Jaunes. L’occasion aussi de saluer le combat des salariés de General Electric, d’autres banderoles soutenant par ailleurs ce combat syndical. La puissance de Contraddiction et de Furia prend tout son sens sur scène, et Mouss finit par se jeter dans le public. Les Mass Hysteria sont bien un des plus grands groupes de métal français, et si l’absence de Max Cavalera de Sépultura pour un avion raté a déçu les fans, l’ensemble brut et furieux a conquis tout le monde.
19h30, nous abandonnons très vite l’idée d’aller voir ce que donne le show de Angèle sous le chapiteau Greenroom, non pas que nous soyons rebutés par sa pop acidulée qui a fait chanter nombres de fans et de curieux mais tout simplement parce qu’il est complètement impossible d’accéder au chapiteau. Le concert d’Angèle a amassé pas loin de 15000 festivaliers sous le chapiteau, provoquant malaises et du coup déception. Il y a tellement de monde que nous renoncerons même à apercevoir ne serait-ce que les écrans de la scène… nous parviendrons difficilement à rejoindre la grande roue et à prendre un peu de hauteur pour apercevoir le site d’un œil différent et un ciel qui devient un brin plus menaçant… mais aucune crainte, nous tiendrons tête à l’orage (auquel nous échapperons finalement).
Nous avions fait le choix de ne pas nous y rendre, privilégiant le hip-hop de la rappeuse, poétesse et dramaturge anglaise Kate Tempest. La scène de la plage est parfaite pour profiter de son ambiance, avec une belle introduction au piano. Plus que jamais dans son époque, avec Europe is lost pour débuter, la jeune femme déploie toute sa verve, et remerciant régulièrement le public. Il est forcément regrettable que la barrière de la langue empêche ici de saisir la richesse et la force des paroles, mais sa première venue a été unanimement saluée.
Un départ quelque peu précipité est nécessaire pour arriver bien placé et à l’heure pour le concert de Weezer. Plutôt rares en France, même s’ils assuraient la première partie de Muse hier au stade de France, les américains sont sans conteste une des grosses têtes d’affiche du festival.
Leur power-pop qui a fait leur gloire débute en fanfare avec les puissants Buddy Holly puis My name is Jonas, avant les reprises des tubes Take on Me ou Africa, s’assurant ainsi le public à leur cause. Undone puis Berverly Hills, avec un énorme solo de guitare, sont d’autres moments particulièrement forts de leur set. Mais le plus beau restait à venir. Un rappel constitué d’abord d’un quatuor vocal des musiciens sur le même Buddy Holly – quelle claque ! – avant le très attendu Island in The Sun, et une ultime réjouissance avec Say It ain’t So. Une prestation impeccable, rafraîchissante et joyeuse.
Après cet agréable moment, nous passons jeter un œil aux Australiens de Parkway Drive qui alternent entre un metal hardcore brûlant de mille feux grâce à un show pyrotechnique de haut vol et des passages plus mélodiques accompagnés de jolies cordes. Les australiens de metalcore assurent un spectacle pyrotechnique assez incroyable, autour de titres tirés essentiellement de leur dernier album. Le son est incroyablement puissant, et le chanteur est véritablement touché par cet accueil triomphal.
23h00 et alors que Jain se prépare à monter sur scène, il nous faudra faire un choix et ce dernier va vite se porter sur celui qui fait maintenant un peu partie de la famille, Frank Carter & The Rattlesnakes.
En effet, c’est la troisième fois en un an que nos routes se croisent pour notre plus grand bonheur. Après avoir donné un show acoustique mémorable et intimiste à la poudrière en préchauffage des Eurockéennes 2018 et être revenu récemment en personne avec le groupe au grand complet (et un batteur en pleine possession de ses moyens) nous annoncer leur venue aux Eurockéennes 2019 (dans la même salle), nous ne pouvions manquer ce rendez-vous sous aucun prétexte !
Tel un lion en cage, vêtu d’une superbe chemisette, le ton est donné dès le premier titre Tyrant Lizard King. Frank Carter, toujours aussi soucieux du bien-être de son public, notamment des filles qu’il invite à slammer en toute sécurité, délivre un show musclé et énergique. Il ne perd pas son temps et quitte la scène dès le premier morceau pour chanter sur le public, maintenu par les mains fermes du premier rang. Il sera plus tard imité par son guitariste qui jouera un solo en ‘crowd surfing’, autrement dit en parfaite lévitation alors que Frank traversera le chapiteau Greenroom sur toute sa longueur pour chanter du haut de la régie son avant d’être témoin d’un ‘circle pit’. Tous les moyens seront déployés pour que le public passe un moment unique. Comme à chaque fois, bienveillance, électricité, partage, énergie et folie furieuse sont au rendez-vous et les titres tels que Lullaby finiront de convaincre celles et ceux qui avaient pu peut-être encore passer à côté de l’Anglais tatoué. Le refrain final de I hate you sera scandé en chœur par les fans conscients d’avoir encore assisté à un moment qu’ils prendront soin de ranger dans leur encyclopédie personnelle du rock ! Le concert a été mémorable et incroyable, avec deux temps forts. Le premier voit Frank chanter « Happy birthday » à un jeune festivalier qui l’avait noté sur une pancarte, avec son rêve de jouer à la guitare Vampires. Rêve exaucé puisque Frank le fait monter sur rêve et lui donne une guitare. Deuxième temps fort : à la fin du set, Frank traverse la scène, monte sur la régie son et continue de chanter comme si de rien n’était. On comprend pourquoi le frontman se dit prêt à revenir l’année prochaine au Malsaucy, en sueur mais très heureux.
Tout le monde affiche un large sourire après le passage de l’ouragan Carter, y compris les membres du groupe, mais voici venu le moment de quitter la presqu’île du Malsaucy en se disant que 3 jours sont déjà passés à vive allure et qu’il faudra revenir très tôt demain pour ne rien manquer du dernier jour…
Quelques titres des Allemands Mantar nous accompagnent sur le chemin du retour, où nous partageons tous le sentiment d’avoir vécu une journée pleine et mémorable sur ce festival plu que jamais internationalisé, imprévisible et toujours jouissif.
Mars’Ial et Julien Lagalice