Second temps de l’entretien réalisé le 12 janvier 2019. Lien vers la première partie.
Bonne lecture.
Sensation Rock – 2018 a été une année quasi-blanche pour Last Train, du moins côté concerts. Qu’en sera-t-il de 2019 ?
Jean-Noël Scherrer – On est au White Bat Recorders afin d’avancer sur le deuxième album, qui sortira cette année, on l’espère … mais il n’y a pas de raison. On reprend la tournée cet été tranquillement et intensément à partir de l’automne.
Sensation Rock – Peux-tu préciser pour cette reprise estivale ?
Jean-Noël Scherrer – On va faire quelques festivals, dont des dates françaises. Tout n’est pas arrêté mais on va essayer de faire un passage local.
Sensation Rock – Côté album, comment s’est déroulé le processus ? Cela faisait 3 ans que vous étiez sur la route…
Jean-Noël Scherrer – C’était chelou pour nous…
Antoine Baschung – C’est la première fois que l’on se posait pendant 6 mois, que l’on a écrit des morceaux sans les tester en concert, puis on est entré en studio. En comparaison avec notre premier album, où les chansons sont essentiellement nées du live, là on a pris le parti de les construire pour elles-mêmes. Elles évolueront sûrement après sur scène. C’est un processus clairement différent.
Jean-Noël Scherrer – Pour la création, pas pour l’enregistrement.
Antoine Baschung – C’est vrai que pour l’enregistrement, ça reste un peu la même chose que pour Weathering, c’est de la prise live. En ce moment, Jean-No réenregistre le chant et ajoute des trucs. Par exemple un synthé ici pour renforcer les graves, des chœurs, etc. C’est aussi une partie intéressante du processus. De nouveau, il y a cette production en 2 phases : d’abord le squelette de la chanson, réalisé en live tous ensemble et après les ajouts, les finitions.
Sensation Rock – Sera-t-il dans la lignée musicale de Weathering ?
Rémi Gettliffe – Il s’ra metal ! (Grand moment cacophonique)
Antoine Baschung – T’as dit que hip hop marchait bien en France … Hip hop synthé (gros rires).
Jean-Noël Scherrer – On fait de la grosse trap (sourires). C’est relativement similaire au premier. Ça a pris trois années, c’est plus mature même si c’est cliché de dire ça…
Antoine Baschung – … mais c’est un peu le cas. Je trouve qu’il y a des choses différentes mais je peine à les décrire.
Jean-Noël Scherrer – Il y a des choses que l’on n’osait pas faire auparavant que l’on a tentées sur cet album. Il y a aussi des trucs que l’on ne savait pas faire, désormais on a la méthode. C’est un album du cœur. Le premier c’était un peu du n’importe quoi parce que la tournée était au centre de tout, tout le temps. Les premiers titres composés dataient de nos 17 ans, tandis que les derniers sont nés 6 mois avant la sortie du disque. C’était un gros melting pot. Le nouveau est un concentré sur 6 mois, sur une période bien plus courte mais plus intense, chargée en émotions pour tout le monde. On en est assez fier.
Sensation Rock – Vous finissez l’enregistrement ici en Alsace, dans votre fief. Mais le reste a été réalisé en Norvège. Quels ont été les raisons et les points forts de travailler là-bas ?
Jean-Noël Scherrer – Depuis le début, on travaille avec Rémi, on le traine toujours partout parce qu’on l’aime bien (rires) et que l’on a toujours voulu bosser avec lui. Fort de l’expérience du premier disque, on s’est dit que pour le suivant, on irait ailleurs pour enregistrer le squelette. Rémi nous a proposé plusieurs studios. On était un peu près sûr de ne pas vouloir rester en France, surtout de ne pas aller à Paris …
Antoine Baschung – C’est ça : pas en France et pas dans une grosse ville.
Jean-Noël Scherrer – Et là, il nous propose un studio perdu en Norvège, au milieu de la mer… (sourires)
Rémi Gettliffe – Je connaissais la réputation du lieu (l’Ocean Sound Recordings est basé à Giske, NDLR) et le matériel mis à disposition. On voulait cocher plein de cases. Ici le squelette n’aurait pas été foncièrement différent, d’un point de vue technique et sonore, mais il y avait des prérequis du côté du groupe et du mien également. Il fallait trouver le studio où tout cela matchait. Côté groupe, ils voulaient que Jean-No puisse jouer avec son ampli à balle dans la pièce sans avoir besoin de casque et sans que cela soit trop contraignant pour la prise acoustique de la batterie. Il fallait donc une pièce avec un certain volume; pour moi, une fiche tech’ qui soit similaire à celle de mon studio. Il y avait plusieurs endroits qui validaient ces critères, le côté exotique a joué aussi avec la vibe du groupe. Quand t’écoutes l’album, tu penses vraiment aux grands espaces. Il y a beaucoup d’espaces dans la musique, tu devines la mer, …
Sensation Rock – Toi qui as travaillé également sur l’enregistrement du premier disque, quelle(s) différence(s) observes-tu ?
Rémi Gettliffe – Cet album est la suite logique de certains éléments qui étaient déjà présents. En gros le disque ne va pas révolutionner ce que le premier a posé, mais les gars se sont appropriés tous ces nouveaux éléments, les ont affinés pour les assumer davantage. Tout était déjà là quelque part, mais maintenant c’est probant ! Les parties atmosphériques ont été poussées à leur paroxysme, d’où cette sensation d’espaces dans les morceaux sur lesquels on bosse en ce moment. La Norvège c’était le spot idéal pour faire ça.
Antoine Baschung – Le truc que je trouvais excellent c’est qu’entre deux prises, tu pouvais te poser un peu, sortir de la maison pour fumer une clope et là t’étais face à la mer. Idem pour les lumières du matin, … Ajoute à cela, le fait que l’on soit parti avec Rémi, notre ingé son de tournée: on était une petite famille, une colonie.
Rémi Gettliffe – Si c’était à refaire, on refait exactement comme ça.
Jean-Noël Scherrer – Avec une palette envoyée plus tôt. (Gros sourires)
Rémi Gettliffe – Il y avait des affaires personnelles que l’on souhaitait avoir pour l’enregistrement: des machines, des instruments, etc. On a tout bien expédié dans une magnifique caisse, qui est arrivée avec bien sûr 6 jours de retard, …
Antoine Baschung – On avait déjà enregistré la moitié du skeud… (sourires)
Rémi Gettliffe – On a quitté la Norvège le 27 novembre et la caisse est arrivée il y a 5 jours (rires). Ce studio, Ocean Sound Recordings, je savais que c’était la carte joker, je savais que dès que j’en parlerais, on irait là-bas (sourires). J’avais plein d’options, avec des studios cools. On a pensé pendant un mois à Abbey Road. Là, toutes les cases sont cochées en grand: la meilleure console du monde, la salle, tout est parfait mais voilà c’est Londres, c’est chiant. J’avais aussi une idée avec un chouette studio dans le sud de la France, bien équipé et puis je me suis lancé : je leur ai montré la carte Norvège (rires). Finalement, puisqu’on l’a enregistré là-bas, on a bossé exprès d’une façon différente, par principe. C’est peut être pas évident, mais tu ressens qu’il y a une vibe particulière. Tu parlais tout à l’heure des Raconteurs. Leur premier album a été enregistré avec un seul type de micro. Inconsciemment, ça contribue à l’âme-même d’une œuvre. Et là on est parti: le côté voyage, grands espaces, ça a eu forcément un impact, une incidence.
Jean-Noël Scherrer – Les morceaux ont pris une couleur toute particulière qu’ils n’avaient au début. On a vraiment hâte désormais de les faire écouter, de les partager.
-Propos recueillis puis retranscrits: Benoît GILBERT.
-crédit photos: Benoît GILBERT, sauf celle prise en studio (photo extraite de la page Facebook du Ocean Sound Recordings)