En clôture de cette 71e édition – et quelle édition ! -, la Foire aux Vins d’Alsace a placé son incontournable Hard Rock Session. Entre nostalgie, groupe tendance et jeunes pousses, cette dernière date au Parc des Expo de Colmar est un moment délicieux.
Dimanche, on arrive bien plus tôt que de coutume, soit vers 15h. Il faut dire que les conférences de presse précèdent de quelques heures le premier show, show prévu pour 17h. Et c’est Doro qui démarre l’exercice. Très prolixe sur son actualité avant même que l’on lui pose la première question, elle se lance dans un monologue sur son prochain album (Forever warriors, forever united à paraître le 17 août prochain). La prestation fait sourire. A l’issue du quart heure, elle se retire après de multiples photographies accordées aux fans ayant obtenu un sésame pour cet instant privilégié. Suivent dans la foulée les Suédois de H.E.A.T.. Très cools et sans chichi, le groupe encore trop méconnu en France sait que ce concert est un événement qui peut jouer sur sa notoriété dans l’Hexagone. Avant de partir à son tour ils acceptent d’improviser un petit quelque chose sur une guitare insolite qui leur est présentée. Instant collector.
Et ce sont eux les Scandinaves de H.E.A.T. qui démarrent le plateau du jour. Les jeunes envoient du bois d’entrée de jeu avec Bastard of society et Late night lady. Coiffé d’un chapeau à plumes, Dave Dalone est le virtuose de la bande tandis qu’Erik Grönwall assure le show, quitte à se payer une petit bain de foule. Sur son passage, les portables fleurissent. Après avoir gagné les tribunes du théâtre de plein air, il remonte sur scène avec un jeune garçon, lui offrant un instant sur les planches colmariennes. Séquence émotion qui galvanise une foule encore clairsemée mais qui adhère à l’énergie ultra contagieuse de la bande d’Upplands Väsby. Le show se referme avec A shot at redemption ; H.E.A.T. a réussi à embraser Colmar.
Puis vint le tour de Doro. La performeuse allemande est d’emblée largement sollicitée par un public de connaisseurs. La Metal Queen démarre son tour de chant avec Earthshaker rock. Le ravissement durera environ une heure. Heure au cours de laquelle la formation enchaine les titres issus de la discographie de Warlock – prime formation de la diva – à l’instar de Für immer, All we are, … La setlist est également parsemée de quelques morceaux de son répertoire (Lève ton poing vers le ciel et Burn it up), morceaux ultra-fédérateurs ainsi que du tubesque Breaking the law de Judas Priest. Les applaudissements sont nourris lorsque Doro Pesch doit libérer la scène. Une bonne prestation aux faux airs de ballon d’essai avant de se lancer dans la tournée prochaine pour son dernier album Forever warriors, forever united.
Avec l’arrivée des endiablées de Powerwolf, les premières gerbes de slams se donnent à voir. Les premières flammes également. Soyons clairs : nos voisins de Sarrebruck ont le vent en poupe quelques jours après la sortie dans les bacs de leur dernier disque, The sacrament of sin, déjà numéro UN outre-Rhin. D’ailleurs sur la setlist resserrée du jour, trois nouveautés sont proposées, Demons are a girl’s beast friend, Fire and forgive et Incense & iron. Le groupe semble jouer à domicile tant le public lui est dévolu. Des échanges généreux sont donc donnés entre chaque titre, souvent en français avec ce qu’il faut d’accent. Powerwolf sur scène c’est d’abord beaucoup de théâtralité : du backdrop somptueux aux accessoires liturgiques, il ne manque rien ce soir à Colmar. Les poses héroïques des guitaristes faussement gémellaires, les grimaces jubilatoires du claviériste et le regard pénétrant d’Attila Dorn alors que la batterie retourne la coquille métallique alsacienne, non il ne manque rien, si ce n’est du temps car 10 titres, ça passe bien vite. Ils seront de retour en Alsace en début d’année 2019 à la Laiterie, cette fois-ci le show aura des airs d’intimité, enfin on verra …
Avec Ghost un ange passe.. Pardon un fantôme. Peu importe, en tout cas c’est en beauté que cette FAV 2018 se referme avec le final que fut le concert des Suédois. Des flammes, des cotillons, des titres – pardon des hymnes (He is, Dance macabre, …) – repris en chœur, bref le summum. Pas grand’chose à voir avec ce souvenir lointain des Eurockéennes (en 2014, lointain …). Un dimanche soir en lisière de forêt, la scène de Loggia accueillait alors un quatuor sombre, dominé par des capuchons et un pape au faciès bien disgracieux. Lugubre mais pas si inquiétant que cela finalement mais un brin poussif. 4 ans plus tard, la copie a été revue de fond en comble ; si le personnel a été purgé en profondeur, le décor a connu d’importantes innovations aussi. C’est un clinquant parvis de cathédrale, avec vitraux à l’effigie du groupe, qui est dressé sur scène. Visuellement, du bel ouvrage au service d’une prestation du même tonneau. Avec une horde de 5 goules, dont le profil trahit qu’il s’agit pour deux d’entre elles de femmes, le Cardinal Copia et son masque mortuaire livre une grand’messe hard rock. Les titres s’enfilent comme des perles (Ashes, Rats, Absolution, …), les chorégraphies sont parfaites, millimétrées tout comme ces costumes ajustés. Un spectacle vous dis-je au cours duquel rien n’est mis de côté, pas même l’interlude au saxophone du souverain pontife au mitan du set, en guise de coup de fouet pour ceux qui en auraient eu besoin. La fosse exulte, les gradins tapent des pieds et battent des bras depuis le début du show (Mummy dust). A l’issue de la reprise de Roky Erickson (If you have ghost), le groupe quitte les lieux. Et c’est avec Dance macabre (pyrotechnie et tout le toutim) que le concert semble atteindre son paroxysme de théâtralité.
Lorsque la formation se retire pour la seconde fois, le public est vent debout, désireux de ne pas vouloir en finir de la sorte. Le frontman revient et sèchement livre un « Go home ! ». Houspillé comme jamais, il se ravise et propose de rameuter le reste du groupe, incitant le public à jouir en rentrant à la maison. Du grand art.
Benoît GILBERT
-Crédit photos: Benoît GILBERT
Merci à toute l’équipe de la Foire aux Vins pour cette magnifique programmation 2018; à l’année prochaine!