Cinq ans, non vous n’êtes pas devant une rétro des guignols de l’info, cela fait 5 longues années que le retentissant et musclé AM (Domino Records, 2013) dernier opus des Arctic Monkeys attend son successeur. Autant dire une éternité lorsque l’on sait que les quatre gars de Sheffield ont sorti cinq albums en sept ans. Il arrive enfin sous le nom de Tranquility Base Hotel + Casino et nous transporte à mille lieux de la destination où nous pensions aller. Si vous vous aimez l’aventure et les belles surprises c’est par ici ….
À la manière de Radiohead qui dans les année 2000 – usé et au bord du split après le succès planétaire d’OK computer (Parlophone,1997) et une tournée interminable – avait coupé l’herbe sous le pied des tout le monde en sortant le dyptique Kid A /Amnésiac (Parlophone, 2000/2001), Turner et sa bande font de même avec ce nouvel opus. Les britanniques se trouvaient après le succès phénoménal d’AM à la croisée des chemins. Continuer sur leur lancée et devenir un super groupe à fric et une machine à remplir les stades ou faire une pirouette… Là où d’autres sont tombés dans la facilité citons au hasard Coldplay qui semble ne pas avoir encore trouver le fond, les Arctic Monkeys ont pris un risque et ont fait un pas de côté.
Non, il n’y aura pas de AM 2.0, il y aura Tranquility Base Hotel + Casino. Déroutant, sûrement clivant et source de débat houleux entre fans mais très excitant.
Alors oui personne n’osera dire qu’il s’attendait à ce résultat, car nous avions envie d’un rock brut, de guitares hurlantes et de rythmes entraînants. Sans aucun titre présenté avant sa sortie, histoire de faire monter le désir et peut-être aussi pour éviter des semaines de polémique et de débat. On peut dire sans s’avancer que si quelques mois en amont, un des onze titres qui composent TBHC avait été dévoilé, l’enfer ce serait sûrement abattu sur les quatre membres du groupe. Les spéculations auraient été légion et sa sortie ce 11 mai galvaudée. Que nenni, rien n’a fuité et nous avons reçu la galette en pleine face sans mode d’emploi ni de livret explicatif, tant mieux.
Dès l’ouverture et le somptueux Star Treatment, le ton est donné : ça sera down tempo. Sur un rythme lancinant nous plongeons dans une ambiance de bar new-yorkais des années 70. Alex Turner en mode crooner s’acoquine avec ses références : de Gainsbourg à Prince (Science Fiction), de Scorsese à James Bond (Tranquility Base Hotel & Casino), du rock à la soul (She’s Look Like Fun) et les arrange à sa sauce et avec un feeling qui le démarque de plus en plus. Car sous l’étendard Arctic Monkeys cet album sonne et résonne comme une production solo du génie Turner. Tranquility Base Hotel + Casino est avant tout un journal intime regroupant les confessions d’un homme qui a mûri (32 ans) ans et sa vision d’un monde qui tourne de moins en moins rond. L’innocence et l’effronterie des débuts fracassants a laissé place à l’introspection.
Le piano invité de marque…
Composé intégralement au piano et écrit dans son appartement de Los Angeles, TBHC regorge de ballade rétro tel que American Sports, The Worlds First Ever Monster Trucker Front Flip, Batphone ou Golden Trunks. Sans single évident à la première écoute, Four Out Of Five, se démarque au fur et à mesure que nous appréhendons l’album. Plus groovy et avec une présence plus marquée des guitares et la voix modulée à souhait de Turner le morceau s’impose rapidement comme un des plus percutant de cet opus. Définitivement à contre-courant l’album se clôture avec The Ultracheese, slow qui se glisserait volontiers dans les standards du genre.
Les quatre adolescents que nous avons découvert il y a maintenant 13 ans se sont assagis. Tranquility Base Hotel + Casino qui de prime abord apparaît comme un album à part n’est que la continuité de cette mue perpétuelle que propose le groupe a chacun de ses albums. Guidé par un Alex Turner de gala et au sommet de son art, Arctic Monkeys donne un tournant à sa discographie déjà bien étoffée n’en déplaise aux nostalgique d’AM c’est vraiment bon.
Rémy Poidevin
Artiste : Artic Monkeys
Album : Tranquility Base Hotel + Casino
Label/Distribution : Universal Records
Date de sortie : 11 mai 2018
Genre : Rock
Catégorie : Album Rock