C’est toujours avec une grande impatience que nous partons assister aux soirées de l’Impetus Festival, qui, à chaque édition, comble les attentes des férus de musiques divergentes et hybrides. Après une première soirée dans une Poudrière prête à exploser sous la noise de Metz, c’est au tour du Moloco de voir rouge avec le heavy metal de High on Fire et la messe noire de Zeal and Ardor.
Mais avant ces deux formations, place au groupe local Féroce qui ouvre la soirée avec son post-rock drama aux samples cinématographiques. Leur credo “personne ne chante, personne ne danse” s’applique à la fois dans la gravité avec laquelle les morceaux s’égrènent, ainsi que dans la réticence à s’emparer des micros, ne serait-ce que pour donner de la voix et présenter les titres. Parmi ceux-ci, Même de ça tu n’as pas le courage ou Je ne veux pas mourir avant d’être morte sur lequel le set se clôt.
Clou de la soirée pour les aficionados ayant suivi l’évolution du projet, découverte incroyable pour les novices, Zeal and Ardor marque forcément les esprits sans pouvoir passer inaperçu. Pour recontextualiser le projet, on mentionnera que celui-ci démarre sur 4Chan, un forum en ligne sur lequel Manuel Gagneux, en manque d’inspiration, demande aux autres internautes de lui imposer des challenges de composition en trente minutes à partir de différents genres musicaux. Le black métal et le negro spiritual sont cités, les dés lancés, la course contre la montre entamée. Quelque temps plus tard, c’est un énorme succès et un album acclamé qui en résultent, ainsi qu’une configuration de scène puissante : Manuel Gagneux à la voix/guitare, entouré de deux choristes, un bassiste, un autre guitariste, ainsi qu’un batteur en fond de scène. Tous ont des personnalités tranchées et démarquées. Encapuchonnés pour ouvrir la célébration, les six silhouettes se montrent à visage découvert pour attaquer Come on Down et tous les titres du (trop court) album Devil is Fine, ainsi qu’un nouveau morceau plus brusque. Inutile de mentionner que le Graveddigger’s Chant prend une ampleur incroyable. Gospel pâtiné de chants grégoriens, parenthèses électroniques (l’introduction épileptique de Sacrilegium I) sciées de riffs : Zeal and Ardor nous a conviés à sa messe furieuse et orageuse.
Après ce set frissonnant et revigorant (de quoi se convaincre que l’innovation est encore possible en 2018), l’attente des flammes de High on Fire laisse entrevoir des montées de décibels qui nous rappellent bel et bien que nous sommes au coeur des impétuosités. Le concert sera dans le rouge, à l’image de celui du Metz le soir précédent. Saturation, technique imparable et parfaite : les trois musiciens représentent cette scène alternative américaine toujours vivace et hargneuse, qui fête ses vingt ans cette année, et c’est un privilège que nous offre le festival Impetus de pouvoir assister à la célébration.