Lead singer et guitariste de The WrayGunn, l’artiste polymorphe Paulo Furtado qui se cache derrière le projet solo The Legendary Tigerman, nous revient 4 ans après son album True et il a bel et bien des tigres dans son moteur !
Guitariste, compositeur mais aussi cinéaste, la démarche artistique de Paulo Furtado s’inscrit dans une approche esthétique et conceptuelle, une recherche constante de renouvellement.
Avant de débuter l’enregistrement des quinze titres qui composent Misfit, Paulo s’est attelé à la réalisation du film How To Become Nothing. En collaboration avec Pedro Maia et Rita Lino, il a imaginé un road movie à travers le parc naturel de Joshua Tree en Californie, le voyage initiatique à rebours d’un homme qui cherche à s’effacer en ne laissant aucune trace de son existence. Cet objet convoque de nombreuses références cinématographiques et littéraires : du best-seller des eigthies How To Disappear Completely And Never Be Found de Doug Richmond aux films de John Huston et Francis Ford Coppola. C’est cette quête éperdue que nous raconte l’album, la dérive du personnage éponyme dans des contrées hostiles.
C’est sur ces terres arides, dans le célèbre studio Ranch De La Luna, qu’il a enregistré Misfit.
C’est en 2010 que le succès et la notoriété se présente à Paulo Furtado qui publie alors l’album Femina (Sony Music), une série de duo avec des talents féminins de grande envergure (Asia Argento, Peaches, Maria De Medeiros…) L’artwork de Jean-Baptiste Mondino présentait Paulo androgyne et languide fumant une cigarette. Une image qui reste liée à l’artiste et qui rappelle sans ambiguïté le visuel de Love On The Beat de Serge Gainsbourg. Il est beaucoup question de look avec notre homme qui ne laisse rien au hasard, costume blanc, lunettes fumées, il économise ses sourires et cultive son apparence de dandy rock boudeur.
Ce qu’on retient à la première écoute de Misfit c’est cette indéniable tension sexuelle qui émane de chaque album de Paulo Furtado. Quelque chose qui emprunte aussi bien à Alan Vega qu’à Elvis, un flegme suggestif qui sait parfaitement ce qu’il fait. Ayant fait le choix de délaisser sa langue natale, le portugais, pour l’écriture de ses textes, c’est dans un anglais simple que Paulo Furtado évoque les femmes, la chair, l’amour dans un romantisme brut teinté de désespoir. Il rugit, miaule, caresse et griffe avec une maîtrise totale de chacun des registres où il choisit de s’aventurer, faisant le choix de paroles explicites pour partager son émotion. L’énergie globale de ce sixième album rejoint parfois l’explosibilité qui suinte, les guitares lourdes et les productions grasses présentes sur les premiers albums de The Kills. Il exploite alternativement des sonorités blues (Sleeping Alone, A Girl Called Home – Misfit Ballads, Holy Muse) et les gimmicks d’un rock garage plus dépravé (Motorcycle Boy, Fix Of Rock’n’Roll, Red Sun ). Avec I Finally Belong To Someone et Child Lust on retrouve l’essence du rock classique. On se laisse volontiers divertir par le sautillant To All My (Few) Brothers un titre qui sonne bien plus pop que le reste.
L’album dans sa forme originel a été enrichi de quatre titres bonus qui forment un ensemble intitulé Misfit Ballads. Des morceaux plus narratifs qui parachèvent la dérive du personnage avec notamment les très suaves Tango Till They’re Sore et Lonesome Sweetheart.
Misfit qui est dans le même temps le titre de l’album et le prénom du personnage dont il est question, se traduit par « inadapté » en français. C’est finalement ce qu’on retient après une écoute assidue, l’idéalisme frénétique de ceux qui marchent à côté de la plaque transparaît dans chacun des titres. Une réussite qui donne envie de se replonger dans toute la discographie du très légendaire homme tigre !
- Adeline Poidevin
Artiste : The Legendary Tigerman
Album : Misfit
Date de sortie : 19 janvier 2018
Label / Distribution : Sony Music
Genre : Blues Garage, Rock
Catégorie : Album rock