Vendredi 3 février, les américains de Cage The Elephant se produisaient au Transbordeur à Lyon, pour la première édition du festival Transfer, dédié à l’indie rock. Quelques heures avant leur concert, nous avons eu le privilège de rencontrer Matt Schultz, chanteur du groupe. Retour sur une entrevue en tête à tête, avant que ce dernier ne retourne définitivement la salle avec son énergie fougueuse.
Peux-tu me dire, pour ceux qui ne vous connaissent pas encore, quelle est votre histoire ? Vous vous connaissez depuis longtemps ?
Brad, le guitariste du groupe, est mon frère. Nous avons rencontré Dan, le bassiste, grâce à nos pères qui jouaient de la guitare ensemble quand ils étaient plus jeunes. Nous nous connaissons donc depuis notre enfance. Le batteur, Jared, allait à l’école avec Nick, un autre guitariste. Nous avons fait connaissance grâce à Morning Teleportation, un groupe de rock psyché dont nous étions fans. Jared et Nick étaient leurs amis, et ils adoraient également leur musique. Nous nous sommes donc rencontrés à travers eux.
Vous venez des Etats-Unis, mais votre musique est proche de celle des groupes anglais. D’où vient cette influence ? Quels sont ces groupes qui vous ont marqués tout au long de votre jeunesse ?
Daniel, Jared, Brad et moi avons grandi dans une toute petite ville près de Nashville dans le Tennessee. Nous ne pouvions pas vraiment être influencés par la musique qui passait là bas. Cette ville était trop petite, il n’y avait pas de choix. Mais cela a peut-être eu un effet positif sur nous : ça nous a poussé à chercher la nouveauté, par nous-même. Très tôt, nous avons déménagé à Londres avec le groupe. Nous y sommes restés pendant deux ans, et nos yeux se sont ouverts sur l’incroyable choix musical qu’il y avait là-bas. Il se passait quelque chose, au-delà même du pays à proprement parler. Et nous avons puisé l’inspiration dans plein de groupes différents.
Votre musique est marquée par les années 60’s et 70’s, mais est aussi très actuelle. Que pensez-vous de l’émergence de la musique électronique, très populaire aujourd’hui ? Ou encore des « hits » qui passent à la radio ?
Je ne pense pas que tout ce qui passe à la radio soit simplement bon, ou mauvais. Je dirais que c’est plutôt lié à l’étape de la vie dans laquelle tu te trouves, à ton enfance. Je n’ai pas vraiment de problèmes avec ce style musical. J’aime beaucoup les instruments de musique électroniques, les nouvelles technologies. La guitare est devenue électrique il y a plus 50 ans déjà, ça en fait partie ! C’est passionnant de découvrir de nouveaux instruments et d’essayer de nouvelles choses.
L’année 2016 a été marquée par la disparition de grands artistes, comme David Bowie, Prince ou Leonard Cohen. Vous évoquent-ils des souvenirs en particulier ? Ont-il eu un impact sur votre musique ?
Complètement. David Bowie est sans doute l’artiste qui m’a le plus inspiré. Pas nécessairement dans son son, mais plutôt dans son approche. Il était toujours très sincère dans ses paroles, et dans sa façon de créer. Il n’essayait pas de paraître cool, mais il l’était, grâce à ça. Cela a rendu son art et sa musique intemporels.
Je me souviens, le jour de sa disparition, mon frère m’a appelé à 2h du matin et m’a dit : « David Bowie vient de mourir ». Je suis resté un moment dans mon lit à pleurer. J’étais aussi un grand fan de Leonard Cohen, il m’a également beaucoup inspiré.
Vous avez fait un duo avec la grande Alison Mosshart sur Melophobia. Comment s’est déroulé votre rencontre ?
Alison est une personne extraordinaire. Au moment du duo, elle sortait tout juste d’une maladie, une sorte de grippe… Elle est venue chanter la chanson, et en une prise, c’était parfait. Comme tu t’en doutais !
Avec quels artistes voudrais-tu collaborer, dans le futur ?
Oh, il y en a tellement ! Kendrick Lamar, Chance the rapper, Tom Waits, La Femme, j’aime beaucoup ce groupe, The Growlers, Julian Casablancas…
Vous avez collaboré avec Dan Auebarch, le producteur des Black Keys sur Tell me I’m pretty. Certains critiques disent que ses morceaux ont tendances à se ressembler. N’avez vous pas eu peur que votre nouvel album soit trop proche de ses productions habituelles ?
Non. Ce que l’on cherchait, c’était quelque chose de plus brut, plus épuré. Sur Melophobia, on a travaillé très dur pour avoir un résultat léché, bien produit. Avec Dan, on a voulu être plus subtils, moins emportés. L’énergie et l’intensité étaient toujours là. Le résultat était plutôt inattendu.
Si tu devais choisir un album favori ? (Matt hésite longuement.) Bon, ok, peut-être deux ?
David Bowie, Station to Station serait l’un de mes préférés, c’est sûr… The Freewheelin’ de Bob Dylan serait définitivement l’un de mes favoris… L’album Harvest de Neil Young serait aussi dans cette liste.
Est-ce qu’on aura la chance de vous retrouver dans la programmation de festival français cet été ?
C’est le plan, oui…
C’est une surprise ?
Oui, c’est une surprise !
Cela fait plus d’un an que votre dernier album est sorti. Est-ce que vous travaillez sur de nouvelles chansons ?
Oui.
Allez-vous les jouer ce soir ?
Nous ne les jouerons pas ce soir, car c’est encore trop tôt. Pour l’instant, on se contente de trouver des idées, de les partager ensemble, pour voir quelle direction nous allons prendre.
Il y a deux jours, vous étiez à Nîmes, pour une date qui est vite devenue complète. Il est sympa, le public français ?
Oui, c’était génial ! Paris était complet, Nîmes aussi…. Le public a été incroyable.
Pour finir, peux-tu nous dire quelques mots en Français ?
Je peux essayer, mais je suis très mauvais… Je suis trop timide ! Voyons… « Merci beaucoup », « enchanté ». Je peux aussi dire des mots comme « Salon », « chair » (Matt doit probablement vouloir dire chaise), « fourchette », « couteau », « gauche », « droite »… Je peux dire beaucoup de mots mais j’ai trop peur de les mettre dans des phrases !
Merci beaucoup Matt.
Un grand merci à Bob, à Charlie, à Matt et à l’équipe du Transbordeur pour cette rencontre.
– Léopoldine Deriot