5 ans après Let England Shake, prélude musicale raffiné, poétique et engagée, PJ Harvey approfondie son propos avec The Hope Six Démolition Project, une œuvre à la fois naturelle, brutale, et fondamentalement plus politique. Chronique d’un triomphe attendu et violemment mature…
Polly Jean, a la carrière déjà monstrueuse, n’a plus grand-chose à prouver.
Jeune chrysalide prodige et singulière dès ses premières mesures gravées, voilà 25 ans, son univers n’a jamais cesser de s’enrichir. Véritable furie rock à ses débuts, la longiligne anglaise à l’érotisme quasi mystique, ne s’est jamais vautrée sur les lauriers de sa multitude de succès planétaires, toujours différends.
Bien loin des figures de styles, The Hope Six Démolition Project, 9e album de l’artiste, témoigne une fois encore, de son intime conviction. L’art, ou plus exactement son art, est un langage en perpétuelle évolution…
Sur le fond comme sur la forme, cet album est à son image, profondément unique.
Partie arpenter la misère de Washington, les no man’s land du Kossovo, ou les migrations d’Afghanistan, accompagnée de S.Murphy, photographe aguerri, PJ avait besoin de « sentir l’air, la terre, et les populations… » de ces lieux abandonnés, avant que pouvoir et argent ne les conquièrent mieux, de ces pays autrefois merveilleux, et aujourd’hui meurtries par les conflits d’avides chefs de guerres.
La poésie a ses limites quand le chaos s’installe partout…
Sans concessions ni pincettes, la belle brune s’est muée en reporter-rockeuse, et dénonce à tours de riffs et de textes saignants, le désastre et l’effondrement de notre si chère société.
The Community Of Hope, façon Pretenders ou Tom Petty, ouvre sa colère et fixe le cadre d’un album brut de rock à la production sobre et parfaitement sentie.
Enregistré à la Sommerset House, sur la rive gauche de la Tamise, avec ses seconds Flood et Parish, dans des conditions pour le moins inhabituelles, puisque durant 45mn par jours, quelques amateurs privilégiés, premiers arrivés, pouvaient assistés aux séances, derrière une vitre sans tain… Une volonté de transparence comme pour mieux exorciser ses indignations…
Et ainsi déroulent ces 11 titres, ou gouvernants et/ou gouvernements prennent une bonne volée de petits bois dans les dents.
Avec grâce et solennité rock comme dans The Ministry of Defence, ou avec rage et anarchie bluesy comme sur The Ministry of Social Affairs, qui s’achève par ailleurs sous les envolées magnifiquement dramatiques d’un saxo enragé…
Une majorité de titres tendus comme des arcs, des mots comme autant de flèches empoisonnées, Polly Jean est cette indienne pleine d’amour et de révolte qui sillonne les vallées du monde en chantant, protège les opprimés, les laissés pour compte, et rêve de soulever des montagnes…
La cause est noble et l’ensemble de l’album, par son concept, est juste admirable.
Polly Jean est une reine…
Artiste : PJ Harvey
Album : The Hope Six Demolition Project
Label/Distribution: Island Records
Date de sortie: 15/04/2016
Genre: Alternative Rock Indie
Catégorie: Album Rock