Un masque de crâne. C’est avec ce signe d’identification, pourtant déjà vu et revu -mais jamais de cette façon-là – que Gost s’est imposé en l’espace d’un an. Un masque réaliste, moqueur, un artwork saisissant et c’est une nouvelle révélation pour la scène synthwave. Un son d’une puissance de souffle phénoménale qui s’étale dans un album sans un seul titre moins fort que les autres. Le voilà enfin en tournée de ce côté de l’Atlantique, l’occasion de lui poser quelques questions.
Vous revenez tout juste d’une partie de la tournée Perturbator/Gost dans l’Est de l’Europe. Comment était-ce ?
Incroyable ! La foule était très énergique. En Ukraine, tout le monde était extrêmement accueillant. Je me suis vraiment éclaté, et je souhaiterais y retourner.
Tu as commencé à mettre en ligne tes premiers morceaux il y a trois ans, en 2013. Il y a eu une nette évolution depuis, tes compositions sont plus graves, plus violentes. Comment l’expliques-tu ?
J’ai pendant longtemps joué du métal et j’ai essayé de me dégager de cette lourde influence musicale. Mais peu à peu, elle est revenue. Plus je me suis mis à composer et plus cette influence était présente. C’est comme une évolution naturelle.
Sur Metalsucks, on peut lire que Behemoth “is the most metal non-metal album you will hear this year”. Est-ce que tu te sens proche du public métal ?
Oui, je me sens proche de la scène métal, d’autant plus lorsque je joue de la synthwave. La plupart de mes amis en font partie ; je m’en rends également compte lorsque je rencontre mon public.
La couverture de cet album est juste terrible. Est-ce qu’elle te représente ?!
Elle représente le démon qui est traditionnellement associé à Behemoth !
Est-ce que tu portes ce masque depuis le début de ton projet ? Qu’est-ce que cela représente pour toi, de recouvrir ton visage ? C’est une façon de rester anonyme, de dépasser des inhibitions, d’être quelqu’un d’autre…
Oui je le porte depuis le début. Et je crois que c’est un peu pour chacune de ces raisons, mais ça va aussi avec cette idée d’incarner un démon, de montrer une forme de véritable moi. Donc oui, cela m’aide à rester anonyme et cela m’aide à dépasser mes peurs.
Pourrais-tu monter sur scène sans ?
Non : le masque me transforme.
Dans la Bible, Behemoth est une force contre laquele les humains ne peuvent pas lutter. Est-ce que la musique est ton propre Behemoth, ton propre monstre ?
Bonne question ! Oui, vraiment, c’est une obsession contre laquelle je ne peux m’élever. Que je sois fatigué, que j’aie des problèmes, cette obsession persiste. C’est le poison et l’élixir.
Un de tes morceau s’intitule Ripper, l’autre Bathory... Es-tu fasciné par ces mythes de tueurs ? Penses-tu que la musique puisse être une catharsis ?
Je ne suis pas fasciné par l’acte même de tuer mais par le fait de chercher à contrôler d’autres êtres humains au point de les tuer. Quant à la catharsis, clairement oui, c’est une échappatoire, un moyen de s’extérioriser. Si je ne pouvais pas créer… Je ne sais pas ce que je deviendrais, je ne sais pas ce que je ferais. Mon esprit est toujours tourné vers la musique.
Night Crawler est un morceau construit en deux parties : il commence en force avant de ralentir tandis que la seconde moitié commence uniquement sur un tempo avant de s’enrober et d’accélérer. Quel est le but de ta musique, cherches-tu à surprendre ?
Je n’ai pas de but en particulier, ça vient naturellement. Je commence une partie et la suite arrive sans y réfléchir, sans volonté.
Avec quel équipement est-ce que tu travailles, pour composer et sur scène ?
Quand je suis chez moi, j’ai l’habitude d’utiliser un Roland JX3P, un Oberheim DMX… J’en ai quelques-uns. Sur scène, j’ai un sampler et un laptop.
Quel est l’élément principal de tes compositions ?
Je commence toujours par les lignes de basse. Toujours.
Tu utilises très peu de voix, à l’exception de Without A Trace…
C’est une question d’opportunités. Le prochain album aura trois pistes contenant des parties vocales féminines. Avec le genre que nous faisons, Perturbator, Carpenter Brut, les timbres des voix féminines se marient mieux.
Ton bandcamp s’appelle “Gost1980”. Master sonne comme de la musique indus, es-tu inspiré par cette scène-là, comme Skinny Puppy…
Enormément oui. Skinny Puppy, NIN… Quand j’étais plus jeune.
The Chasm est aussi le nom d’un morceau de Dan Terminus. Toi, de quel gouffre parles-tu ? Au sens premier ou figuré ?
Cela figure quelque chose de boueux, sombre, une caverne. Un lieu très sombre.
Tu as mentionné un prochain album…
Ce sera différent, plus orchestral et conceptuel, avec moins de synthés et des morceaux plus lents, moins dansant. Il y aura aussi des vidéos pour l’illustrer.
-Clémence Mesnier
Crédits photos : Francis Malapris / http://malapris.com