Maestro parmi les maîtres, le plus célèbre dandy de la planète nous revient avec Blackstar, un vingt-cinquième album, pondéreux, anxieux, et brillantissime.
En d’autres âges on l’aurait qualifié d’avant-garde, aujourd’hui, on le classera dans les conceptuels presque classiques, si chères à l’homme qui venait d’ailleurs…
Difficile de passer au travers l’événement considérable que constitue la sortie d’un album du grand blond. Devenu aussi discret qu’il fut exubérant (une apparition scénique en dix ans, aucune interview), à l’aube de ses 69 ans, les compositions du caméléon sont les seuls discours qu’il daigne distiller à ceux qui voudraient l’entendre plus. Une forme de marketing galactique extra-terrestre qui, a l’évidence, lui sied comme un scaphandre de velours…
Blackstar fait sans doute partie de cette nébuleuse qu’il est le seul humanoïde a avoir exploré dans ses moindres cratères, et de vouloir partager l’expérience avec nous, minus petits terriens.
Le titre homonyme, présenté voilà deux mois, véritable ovni de 10 minutes, à la fois bienveillant et hanté, expérimental et abordable, angoissant et délicat, présageait d’un message en forme de chef-d’œuvre…Une sensation totalement confirmée en écoutant les 7 titres qui habitent cet album, pénétrant élégamment les limbes de nos cerveaux malades…
A l’exception de Sue (or in a season of crime), une revisite plus ou moins heureuse d’un inédit déjà présent dans l’anthologie sortie à l’été 2014, le reste est tout simplement du Bowie grand millésime.
Un morceau (Sue), qui à défaut de pertinence, sera à la génèse de Blackstar, puisque c’est lors de l’enregistrement de cet hybride, première version, à l’époque accompagné de l’étonnant orchestre jazz de Maria Shneider, que Bowie rencontra Donny Mc Caslin, saxophoniste de son état, devenu le principal artisan et collaborateur du projet Blackstar. En chef d’équipe très averti, Mc Caslin recruta quelques collègues, non moins avisés, pour illustrer les idées sublimes et subliminales du génie. Et le résultat ne manque pas de classe, d’esprit, et de talent. Ni de sax sauvageon ou freestyle selon, comme sur ce titre, rythmique et possédé, ‘Tis A Pity She Was A Whore.
Lazarus, balade aux frontières de la coldwave et de la soul, est un pur diamant qu’aucun créateur-sertisseur autre que Bowie, ne saurait mieux sculpter.
A la fois si distant et si proche, comme sur les plus popisants Dollar Days ou I Can’t Give Everything, s’inspirant autant de ses amis, ses modèles ou collaborateurs (Reed, Eno, Fripp…), de ses expériences, ses périodes (Space Oddity, Heroes, Scary Monsters…), Bowie est doté d’un don unique et singulier : celui de nous surprendre, se renouveler, tout en puisant l’inspiration dans ses propres références artistiques.
En filigrane de cet album, outre l’omniprésence du sax de Mc Caslin (un tantinet trop parfois), une voix, toute en rupture, comme le symbole d’une carrière et d’une œuvre multidirectionnelles, construit d’innombrables changements de cap.
Bref, Blackstar est un délice de mille-feuille sonore qui explose un peu plus à chaque écoute, et magnifiquement servi par la bande à Mc Caslin, en particulier Mark Guiliana (batterie) et Tim Lefevre (basse). L’indefectible Tony Visconti s’occupe comme d’habitude du reste.
Pour conclure je retiendrai cette petite phrase d’un fan anonyme : « Quand j’écoute Bowie, j’ai l’impression d’entendre un espèce d’étranger très intime qui ne me veux assurément aucun mal, et pourtant bien incapable de me souhaiter le meilleur… »
-Peterpop
Artiste : David Bowie
Album : Blackstar
Label/Distribution: RCA/Colombia Records
Date de sortie: 08/01/2016
Genre: Artrock
Catégorie: Album Rock