Grande ampleur pour le festival Détonation qui se décline sur deux sites cette année. Deux espaces, deux ambiances, l’une très festive à la friche industrielle, l’autre plus intimiste dans la salle de La Rodia.
Pas moins de six silhouettes sur scène accompagnent Hindi Zahra : deux guitaristes, un bassiste, un percussionniste, un batteur et un claviériste. Hindi Zahra nous marque d’emblée par le charisme qu’elle dégage, l’effet léger d’écho sur sa voix est enchanteur. La section rythmique est mise en avant, créant un groove qu’Hindi Zahra pointe de sa main. Elle ferme les yeux, vit ses chansons de l’intérieur. La femme qui est sur scéne est bien plus “réelle” que celle, impassible, photographiée sur la pochette de son dernier album, Homeland.
Son timbre si spécial (oserait-on prononcer le nom d’Amy Winehouse, pour le grain légèrement eraillé ?) se déploie notamment sur la dernière touche des voyelles. On la verra rejoindre la section rythmique (la simplicité d’un grésillement de clef faisant office d’instrument en soi), on entendra aussi un solo de trompette. Tout le monde se retire de la scène avant qu’une lumière sablonneuse ne l’imprégne lors d’un Beautiful Tango, avant un Set Me Free, moyen de partir “away from the troubles”. Le temps d’un rappel, dernier voyage en direction de Marrakech, à voix basse sur flûte traversière, et Hindi Zahra entrera en transe, tempêtueuse et terrestre.
Changement d’ambiance une demie-heure plus tard, le temps d’admirer l’allée de néons en direction de La Friche, avec Jeanne Added. Sa batteuse, Anne Paceo, s’est fait (et nous a fait) des frayeurs puisqu’elle s’est foulé la cheville aux répétitions. Elle est quand même sur scène pour notre plus grand soulagement, avec une énergie sans baisse de régime.
Mise en valeur autant par les spots que par la prédominance de la voix sur les instruments pour ce premier morceau de Be Sensational, Jeanne Added enchaîne sur Miss It All. Les synthés de Narumi Herisson sont tout en rondeurs, telle la basse que Jeanne a laissé reposer pour ce morceau. Les lumières crépitent, le tempo monte peu à peu. Les transitions appuient sur la joie et la nécessité de jouer ensemble, toutes les trois, trio féminin. On sent les touches personnelles que chacunes des musiciennes viennent apporter, se rappropriant l’album d’une façon différente que l’enregistrement.
Voilà It, sur une lumière bleutée qui met son visage en valeur. Bleu lagon et bleu marine agrémentent les poussées de voix retentissantes avant que l’accalmie Look At Them ne laisse place à l’émotion. Tons rouges pour les “la” de A War Is Coming qui monte crescendo jusqu’à Back To Summer, à coups de caisse claire dansante. On entend le contraste entre le refrain, incisif, et les couplets, plus coulants. Déjà le terme de ce set approche avec Lydia, hommage à Lydia Lunch, dont la scansion finale nous fait penser à une prononciation hip-hop. Suddenly et Night Shame Pride achèveront ce concert extrêmement réussi.
On retiendra de cette (très) belle prestation un show plus puissant, plus assuré et plus visuel que par le passé. Jeanne Added, Anne Paceo et Narumi Herisson forment dorénavant une section incontournable de la scène francaise.
-Clémence Mesnier
Crédits photos : Eric