En ouverture du festival dédié aux cultures alternatives La Poudrière de Belfort s’est chargée de soufre. S’il restait dans ses caves de la poudre à canon, nous avons eu de la chance de ne pas voler en éclats tant la soirée fut inflammable.
Premier groupe au programme, Horskh démarre en trombe dans son ambiance nerveuse si atypique. Signature visuelle et disposition scénique identifiable vont faire affluer le public dans la stupéfaction pour le deuxième morceau. Le temps d’un interlude plongé dans une obscurité bleutée au cours duquel les nappes électroniques reprennent le dessus et la batterie repart au quart de tour. Au quatrième morceau le tom basse résonne pendant que les projecteurs rougeoient. Voix sinueuse et modulable. Un nouvel interlude, moment de souffle où chacun se dérobe derrière machine et instruments. Mais l’interlude ici n’est pas une pause ni un répit, plutôt un sas de suspens qui crée un état d’attente. Une précipitation de lumières volcaniques jaillissent tandis que la guitare électrique émerge : cordes éraflées, éclats de voix balafrés. Damaged Ropes arrive pendant que des rayonnements dorés et éblouissants s’échappent des spots. Fin du set avec Magma ; une nouvelle fois, Horskh a démontré que les scènes rock, indus et électroniques allaient devoir compter sur eux.
Le temps de prendre l’air et des hurlements nous rapatrient vers l’intérieur. Un nombre plus élevé de musiciens s’imposent sur scène avec Blockheads. Un autre univers qui se fonde moins sur l’éclairage que sur la projection d’images animées en fond de scène. Dès le second morceau un slam est initié, contact ininterrompu avec la salle tout le long du concert, entre slam, questionnements et excursion hors scène. Voix déglutissante, bloc compact de solidité ancré au centre, dans la posture grindcore typique de l’accroupissement, tête proche du sol prête à frapper. Parmi les échappées on entendra “putain de société : soyons libres !” qui préfigure le chaos, entre éclaboussure du public et escalade des poteaux bordant les planches. Le jeu est de plus en plus violent, les cymbales sont rouées de coups et le bassiste donne à son tour de la voix. “Tuez les conneries à la télé”, les phrases s’enchaînent à un débit qui mitraille. La set-list est d’ailleurs aussi longue que le flot de mots à la minute.
Les tant attendus Godflesh arrivent sans attendre avec un bruitisme doublé d’un fond de simili-magma rouge en arrière. Le public s’est encore plus resserré. Pas de communication ni d’interaction ; peu importe le contact avec la salle car la réceptivité est d’emblée acquise. Tremblements à la vue de masques, de croix et de figures christiques noircies qui défilent, ébauchés au fond. Figures du martyre. Pas de batterie bien entendu, Godflesh a un côté minimaliste ; la voix y tient une place nettement moins imposée que dans les groupes précédents, mais elle n’est même plus nécessaire pour créer des effets et mettre dans un état second, comme hypnotisé.
Par le terme Impetus, on entend un vocabulaire militaire de la charge, de l’assaut. Ce n’est pas la peine de faire un dessin ni d’ouvrir un dictionnaire latin : il suffisait d’entrer dans la salle pour voir la traduction en image de ce nom commun. À l’instar du dernier album de Blockheads, on pourrait affirmer que This World is Dead et que seules les cendres peuvent le ré-animer.
-Clémence Mesnier
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