En septembre dernier, à la Rodia (Besançon), lors du festival Détonation, nous rencontrions Raphaël D’hervez, le chanteur et porteur du projet Pégase. Dans cette interview on parle cinéma, tournée, Minitel Rose, Thibaud Vanhooland ou le super bassiste. Entre rêve et réalité, comme toujours chez Pégase.
SR : Après la sortie de votre premier album éponyme en février tout s’est enchaîné très vite. Vous êtes actuellement en pleine tournée nationale. Comment se passe t-elle ?
Raphaël D’hervez : Ben ça se passe très bien. Une tournée c’est toujours plein de rencontres, beaucoup de plaisir. On a commencé en février, donc on a pas mal tourné au printemps, quelques beaux festivals cet été et là on reprend la route. Hier c’était notre date de rentrée, donc on sera sur la route tout l’automne.
SR : Quel était votre festival préféré de l’été ?
RD : Ils étaient tous très sympas et très différents. Là où j’ai été vraiment étonné, c’était aux Eurockéennes de Belfort parce qu’on a joué à 17 heures et tous les gens étaient là pour nous accueillir. On est passé en premier. Et c’est vrai qu’on a toujours cette appréhension de jouer en premier, les gens ne sont généralement pas encore arrivés ou alors ça peut arriver qu’il y ait un autre concert en même temps et on joue devant personne.
SR : Et pourtant il y avait plein de monde !
RD : Oui il y avait vraiment du monde et le lendemain on a vu des articles dans des journaux nationaux sur la prestation. On s’est dit : ” putain mais c’est génial “! C’est quand même chouette ce genre de festival ou même en jouant en premier, on arrive quand même à marquer le public, les gens et la presse.
En plus, on a un bon souvenir de ce jour-là parce qu’on arrive, il pleuvait, les gens dans la boue depuis 2 jours et à la première note de musique, les nuages se sont écartés, il y a eu un grand rayon de soleil et après il n’y a plus eu de pluie. Donc tous les techniciens étaient en train de nous dire : « mais merci, merci, c’est vous qui avez ramené le soleil » rire.
SR : L’atmosphère qui se dégage de votre musique invite à la rêverie. D’ailleurs, on a souvent employé le terme Dream pop pour définir votre musique. Le rendu est extrêmement fluide, mais j’imagine qu’il y a un vrai travail de fond là derrière. Comment composez-vous pour arriver à ça ?
RD : Je n’ai pas vraiment de recette miracle pour composer. J’essaye de composer de manière très instinctive. Je fais vraiment le vide, je ne pense à rien. J’intellectualise le moins possible. J’ai un rapport particulier avec le matériel, avec les vieilles machines, avec les instruments et c’est quelque chose qui m’inspire. J’aime bien laisser tout brancher et me laisser porter, passer d’un clavier à un autre, à une guitare etc.…Je fais plein de sessions. Je suis très productif, par contre je suis très difficile avec moi-même donc je ne garde pas grand-chose.
J’aime bien aussi laisser vieillir des chansons. Il y a des chansons que je fais exprès de ranger dans un tiroir, de les oublier un peu, et de les laisser pendant 3, 4 ans et puis après de repartir dessus.
SR : Vos clips se passent souvent la nuit, dans le brouillard ou la brume. Serait-ce une manière de venir renforcer le mystère derrière le mythe du cheval aillé ?
RD : rire, oui sûrement.
SR : Pégase c’est un peu la réunion de Minitel rose et de Rhum pour Pauline, si vous pouviez faire une collaboration avec un autre groupe, ce serait lequel ?
RD : Je ne sais jamais trop quoi répondre à cette question parce j’ai la chance, à côté de mon projet solo, d’être producteur et de collaborer avec pas mal de groupes donc j’ai pas cette frustration-là. Le prochain album que j’ai enregistré, produit, mixé c’est l’album d’un groupe qui s’appelle Disco Anti-Napoléon qui sort le 3 novembre. Et j’invite tout le monde à découvrir cet album, qu’est un superbe album.
SR : Et en parlant de Minitel Rose, c’est fini ou c’est mis de côté pour le moment ?
RD : Oui c’est mis de côté. Dès le départ avec ce groupe on s’était dit qu’on sortirait deux albums et qu’ensuite on prendrait le temps. Et c’est ce qu’on a fait, on a pu développer notre label. Pour ma part j’avais vraiment envie de faire du développement. De prendre des groupes, comme les Rhum pour Pauline ou Disco Anti-Napoléon. C’est des groupes dont j’ai vu les premiers concerts, c’était dans des bars avec 5 personnes, ils avaient 3 morceaux et j’ai senti un peu le potentiel. Et j’aime bien vraiment être au début de l’aventure avec un groupe. Mais quand t’es tout le temps parti en tournée c’est un peu dur. Minitel Rose ça tournait beaucoup, pas mal à l’étranger. Et du coup on avait décidé ça assez tôt.
Mais on se voit toujours, on travaille ensemble. On a le label donc on ne se perd pas du tout de vue. N fait même régulièrement de la musique ensemble, tous les trois. Au moins trois fois par an, on se fait des sessions en studio. D’ailleurs les dernières sessions qu’on a faites, c’était pas du tout du Minitel Rose, on fait juste de la musique ensemble. Par plaisir.
SR : Dans votre album, chaque piste génère son univers autant musicalement que visuellement dans les clips.
RD : Merci.
SR : Quelles sont les muses qui vous inspirent toutes ces atmosphères ?
RD : il y a plein de choses qui m’inspirent, plein de choses différentes. Il y a des rêves, parfois des films ou des rôles, des actrices ou des souvenirs. Ma petite amie m’inspire beaucoup aussi. Pas beaucoup la musique. Tu vois il y a des groupes tu les écoutes et tu te dis : « Ah ouais, là ils ont telles influences » ben moi, j’écoute pas de musique du tout quand je compose. Je passe ma journée, même mes nuits à composer. Donc quand je rentre chez moi en général j’ai pas vraiment envie d’écouter de la musique. Rire. Donc je fais d’autres choses ; Je suis un grand passionné de cinéma, ça se pense que ça s’entend dans ma musique.
SR : Et ça se voit dans les clips.
RD: C’est que le cinéma pour moi c’est plus qu’une passion, c’est toujours un rêve. J’ai toujours ce rêve d’arriver un jour à faire du cinéma. Du coup c’est vrai que sur les clips ça me permet d’avoir un pied dedans et de toucher un peu ce rêve.
SR : Tu aimerais faire quoi dans le cinéma, la musique… ?
RD : J’aimerais bien devenir réalisateur.
SR : Et si tu pouvais travailler avec des acteurs ou des réalisateurs, ce serait avec quoi ?
RD : J’aime bien les réalisateurs qui trouvent des inconnus en fait. J’aimerais mieux partir à la chasse aux nouveaux talents.
SR : Écoutez votre musique c’est un peu comme prendre de la drogue : ce que l’on ressent dépend de l’état d’esprit dans lequel on se retrouve à la base et se retrouve décuplé. Comment avez-vous réussi à créer quelque chose qui ait une telle faculté d’adaptation ?
RD : C’est parce ce que c’est à peu près la seule chose que je m’impose. Je m’impose en général absolument rien, je me refuse rien quand je compose. Mais par contre j’aime pas imposer trop des choses à l’auditeur. J’aime bien lui laisser de la place pour que la chanson lui appartienne aussi et qu’il en fasse un peu ce qu’il a envie.
SR : Auriez-vous une anecdote, quelque chose d’inattendu et de soudain qui vous est arrivé et que vous aimeriez partager ?
RD : Hier soir on jouait à Rouen, dans la salle du 106 qu’est une super salle. Et mon bassiste joue avec un autre groupe. Et il avait un concert le même soir. Et donc quand ça arrive il se fait remplacer dans l’autre groupe, sauf que là, le remplaçant ne pouvait pas. On a eu la chance que les concerts soient à 60 km d’intervalle. Ils ont fait décaler le concert de son autre groupe plus tard et il a donc fait le concert avec nous. Et à la dernière note du concert, il a remercié le public.
Il a couru dans un taxi qui l’attendait devant la salle, il a fait genre 60 km en taxi, un autre bénévole l’attendait en voiture pour l’emmener jusqu’à la salle. Il est arrivé, il a branché sa guitare et il a joué. Rire. Et je voudrais inciter personne, mais il est fumeur et il m’a dit « j’ai même réussi à négocier pour que le taxi ne laisse fumer une cigarette dans son taxi, sinon j’aurais pas eu le temps d’en griller une. » Faire un concert, le même soir, dans deux villes différentes, avec deux groupes différents c’est un bel exploit.
SR : Raphaël, tu nous as parlé tout à l’heure de ton label, Futur Record. C’était important pour vous de produire sous votre label ?
RD : Je suis content d’être sur mon propre label, ça c’est sûr. Par contre si demain j’ai une super proposition, je vais pas me bagarrer avec moi-même. Après moi j’ai fait un label parce que c’était un rêve, mais aussi, parce que c’était une époque où on était en pleine crise du disque. Et que tous les labels flippaient, que c’était super dur de faire de nouvelles signatures et que si j’avais attendu les labels, je pense que j’aurais attendu longtemps avant que ma musique sorte.
Interview réalisée par Justine L’habitant.
Crédit photo Guillaume Canva.
http://www.youtube.com/watch?v=ptuoYAlrxe4