De passage à Fribourg pour la deuxième partie européenne du Event 2 Tour, Deltron 3030 a mis le feu à la scène du Fri-Son, accompagné pour l’occasion de l’éphémère Fri-Son Orchestra. Sensation Rock a rencontré le DJ du groupe, le joyeux Kid Koala, l’interrompant en pleine lecture du livre retraçant les 30 ans d’histoire du rock dans la ville helvétique.
Sensation Rock: Event II votre second album a mis plus de 10 ans à voir le jour. Pourquoi avoir attendu si longtemps pour donner une suite à Deltron 3030 ?
Kid Koala: Chacun d’entre nous avons eu beaucoup de projets, en plus de nos carrières solo et autres obligations. Le premier album de Deltron 3030 est sortit en 2000 mais a cependant été éclipsé par le succès de Gorillaz survenu quelques temps après et pour lequel Dan et Del ont participé. Cependant durant tout ce temps pour ma part j’ai pu composer quatre albums et faire deux bandes dessinées, ce qui n’est pas rien. Sans te parler des emplois du temps de Del et Dan qui sont eux aussi très serrés. C’est toujours marrant parce que les gens pensent qu’on a travaillé sur Event II durant 13 ans. A vrai dire cela a à peine pris un an pour écrire et enregistrer le tout. C’est juste que nous avons tous été très pris chacun de notre côté et que nous n’avions pas forcément le temps nécessaire pour se réunir.
SR: Parmi les nombreuses collaborations de Event II, certaines semblent évidentes comme celle de Damon Albarn sur What Is This Loneliness ou encore Mike Patton qui était déjà présent sur le projet Lovage. Cependant d’autres sont surprenantes. On pense à la présence de Jamie Cullum ou encore Joseph Gordon Levitt. Comment choisissez-vous ces collaborateurs ?
KK: C’est principalement des gens que nous avons rencontré tout au long de ces quinze dernières années et avec qui on partage les mêmes façons de voir les choses. J’ai rencontré Joseph Gordon Levitt il y a trois ans par le biais de mon ami le cinéaste Rian Johnson qui a réalisé Looper et dans lequel joue Joseph. C’est lors de notre rencontre que celui ci m’a demandé où en était l’actualité de Deltron. Apparemment Deltron 3030 était un de ses albums préférés quand ‘il était encore au lycée. Je lui ai donc proposé de venir participer au nouvel album. Il a été agréablement surpris et m’a demandé ce qu’il pouvait faire. Je lui ai simplement répondu qu’on trouverait bien quelque chose. Il a ce grain de voix à la Capitaine Kirk et on a trouvé que l’utiliser pour faire l’intro de l’album serait pas mal.
SR: Pensez-vous un jour tous les réunir sur scène ?
KK: Oh ouais je pense surtout que ce serait tellement… impossible (rires). Plus sérieusement ce sont toutes des personnes très occupées. Mais parfois avec un peu de chance et quand les emplois du temps de chacun le permettent on peut arriver à faire quelque chose. Jamie Cullum nous a rejoint sur scène à Londres une fois et Joseph Gordon Levitt a introduit un de nos concerts à Los Angeles. La semaine dernière on a refait une date à Londres. On a donc décidé de contacter à nouveau Jamie mais celui ci se trouvait en tournée à Tokyo au même moment… (rires)
SR: Les arrangements de l’album sont très riches quasiment orchestraux. On a l’impression d’assister à un « hip-hop opéra ». Comment est né ce projet ?
KK: Ce que tout le monde doit comprendre c’est que Deltron 3030 est plus un univers créé par Del avec ces propres personnages qu’un simple groupe. Il a créé cet univers futuriste avec ses personnages et son point de vue, inspiré de notre société actuelle. Notre boulot à Dan et moi est de créer la bande-son de cette histoire. Sa façon d’écrire est très visuelle, très narrative mais aussi très éclatée donc il nous faut travailler dur pour bien tout comprendre. Il a une façon d’écrire très cinématographique. On est donc obligé de s’impliquer à part entière afin que cet univers reste vivant. Les arrangements font ressortir les émotions et illustrent cet univers que Del a créé et il fallait que cela reste très cinématographique. Dan fonctionnait déjà comme ça sur Lovage ou Handsome Boy où il apportait beaucoup de cordes et d’arrangements puisqu’il est avant tout violoniste. Pour ma part j’ai fait dix ans de piano classique. Et lorsque l’on a commencé celui-ci on a eu la même approche artistique et c’était presque naturel. On a envie de raconter une histoire au public à la manière d’un film et notre musique en deviendrait la bande originale.
SR: Ce soir, vous allez jouer avec un orchestre que vous ne connaissez pas. Comment appréhendez-vous cela ?
KK: En fait, on a une chef d’orchestre, Gene, qui écrit les partitions pour les arrangements. Elle est arrivée quelques jours plus tôt pour répéter avec l’orchestre. Et après, nous on arrive et on joue . Et ça marche (rires). Pour être honnête, notre musique reste du hip hop, avec beaucoup de boucles, donc je pense que pour un orchestre c’est facile de se familiariser avec les partitions.
SR: Avez-vous déjà de nouvelles idées pour la continuité de Event II ? De nouvelles collaborations verront elles le jour ?
KK: Pour tout vous dire, on a déjà commencé l’enregistrement.
SR: Donc ça ne va pas prendre encore dix ans?
KK:. Non, en fait, c’est un peu comme Star Wars. L’histoire ne s’arrête jamais. On est toujours en train d’écrire de la musique, c’est plus un problème de timing. Et comme Star Wars où il a mis quinze ans pour faire les trois premiers épisodes, nous c’est un peu pareil. Mais on continue cette histoire qu’on a débuté, tant que Del aura des choses à raconter. Et on y prend beaucoup de plaisir. Ça fait un an qu’on est en tournée. Avant ça, je n’avais pas vu Del pendant presque quatre ans alors c’est juste cool d’être de retour avec ce groupe et de faire de la musique.
SR: Peux-tu nous dire ce qu’il y a sur ta platine en ce moment?
KK: Le dernier disque que j’ai acheté c’est Mosquito de Karen O. Je crois qu’elle a enregistré cet album il y a sept ans mais elle le sort enfin. Elle l’a enregistré dans des chambres d’hotel pendant les tournées des Yeah Yeah Yeahs, ça donne un son très réel, très sale. J’adore.
SR: Tu peux nous parler de tes bandes-dessinées?
KK: J’en a écrit deux. Une qui s’appelle Nufonia Must Fall qui est maintenant devenue une pièce de théâtre. Ça parle d’un robot qui écrit des chansons d’amour mais qui ne peut pas chanter. Et une autre qui s’appelle Space Cadet qui parle de la relation d’un astronaute et de son père, c’est plus sur le fait d’être parents. Et je suis en train d’en écrire une autre à propos d’un moustique…
Interview réalisée par – F. et Johan.
Traduction: Johan et – F.
Merci à Julia du Fri-Son.