Reprise/Warner/2012
A 66 ans, Neil Young ne semble pas être préoccupé par l’âge de la retraite. Et chaque année, notre homme y va de sa petite production, qu’elle soit nouvelle (Le Noise, 2010) ou tirée des archives (A Treasure, 2011). Mais la parution annuelle a un goût particulier : elle voit le retour du Crazy Horse pour accompagner le Loner, chose qu’on n’avait plus vu depuis Greendale il y a neuf ans. Un retour du groupe fidèle a de quoi ravir, on sait que ça va être électrique. Et dans la foulée, on apprend que l’album sera entièrement composés de reprises de classiques, mais à la sauce Neil Young. Car en effet, il ne faut pas se fier au titre : Americana peut tromper, car ici pas de guitare folk ou de banjo. Place à l’électrique et à la distorsion, pour un son unique, la marque de fabrique de Neil Young & Crazy Horse depuis Everybody Knows This Is Nowhere. Le choix des chansons a été fait de telle manière que par leur propos, les compos sont liées entre elles et que bien que qu’elles soient déjà datées, elles sont applicables à l’époque actuelle. Ce qui frappe surtout, c’est la capacité que Young, Talbot, Molina et Sampedro ont à se réapproprier les morceaux, comme s’ils en étaient les auteurs, éclipsant presque les originaux. Ainsi High Flyin’ Bird de Jefferson Airplane n’aurait pas dénotté sur Freedom ou Rust Never Sleeps. Plus loin, on croit entendre la batterie lourde de Fuckin’ Up, puis les premières paroles de She’ll Be Comin’ Round The Mountain déboulent et on se dit que les six chevaux blancs devaient être des crazy horses. Solo sur une corde comme seul sait le faire le Canadien, et où le groupe assure les choeurs. Le titre en perd alors tout son côté enfantin. Et après être descendu de la montagne, on grimpe vite un autre sommet quand pour la seule fois de l’opus les amplis sont mis de côté pour offrir une magnifique ballade folk, la traditionnelle Wayfarin’ Stranger. Bien entendu, pour nous européens qui ne connaissons pas le répertoire des classiques américains, dont certains datent du XIXème siècle (Tom Duda, Oh Susannah), l’impact est différent. Mais puisqu’on y retrouve le style propre au Canadien, on minimise cette ignorance culturelle.
En revanche, on trouve des limites à Americana. La recette ne s’adapte pas à tout. On pense surtout à l’ambitieuse reprise de la folk song de Led Zep, Gallows Pole. Tout Neil Young qu’il est, sa version bluesy ne marche pas. De même pour l’hymne God Save The Queen, original avec sa chorale d’enfant. Mais le titre sera vite oublié.
On pouvait donc craindre une fausse bonne idée dans le concept d’Americana. Oui, tout n’est pas parfait mais réentendre le Loner et son groupe, ça reste quand même toujours un plaisir.